La naissance du stoïcisme

Classiquement, on attribue à Zénon de Kition la paternité du stoïcisme. On ne le confondra pas avec Zénon d’Élée à qui on attribue des paradoxes. Ains, d’après Zénon d’Élée, Achille ne rattraperait jamais une tortue. Puisque, à chaque fois qu’Achille aura parcouru la moitié du chemin qui le sépare de la tortue, celle-ci aura parcouru une petite distance. Une fois que Achille aura parcouru une autre moitié du chemin qui lui reste, la tortue aura parcouru également une autre distance. Et ainsi de suite, Achille aura toujours à parcourir une moitié de la distance qui le sépare de la tortue. De cette façon Achille ne pourra jamais atteindre la tortue. Zénon d’Élée extrapole ce raisonnement à une flèche qui ne pourra jamais atteindre une cible. Zénon d’Élée a été suffisamment malin pour ne pas faire l’expérience avec la flèche et servir de cible. La flèche l’aura transpercé à coup sûr. Si je donne cet exemple d’un autre philosophe de la même époque, c’est pour marquer la différence entre une grande pensée d’une grande profondeur, et une pensée trompeuse.

Zénon de Kition fondateur donc du stoïcisme a vécu au troisième siècle avant l’ère chrétienne. Il avait l’habitude de réunir ses disciples à côté d’un portique. Portique signifie STOA en latin, d’où le mot stoïcismes. Zénon de KITION va définir les grands thèmes du stoïcisme tel que l’ajustement à la nature.
Cette première période est essentiellement grecque.
On subdivise l’ère du stoïcisme en ancien, moyen et tardif.

Parmi les premiers stoïciens, il faut citer de grands noms tels que : Chrysippe de Soles, Diogène de Babylone, Antipater de Tarse, Panelios de Rhodes. Malheureusement on a perdu une majeure partie de leurs textes. En l’absence de document, il est très difficile de connaître de façon directe leurs pensées.
Par contre, le stoïcisme dit tardif, qui est avant tout d’inspiration romaine, nous est plus familier du fait d’œuvres qui nous sont parvenues de façon intacte.

Trois grands philosophes dominent le stoïcisme tel que nous le connaissons actuellement : Épictète, Sénèque, Marc Aurèle.

Ces trois auteurs appartiennent à des conditions sociales différentes et c’est une chose qui est extrêmement intéressante.

Épictète était esclave, et de ce fait on peut dire qu’il subissait les affaires.
Sénèque était ministre et précepteur de Néron, on peut dire qu’il était aux affaires.
Quant à Marc-Aurèle qui était empereur, on peut dire qu’il créait et gérait les affaires.
Nous avons donc affaire à trois angles de vision distinctes, ce qui est en réalité très rassurant concernant le stoïcisme. Cela revient à dire que la philosophie stoïcienne n’exclut ni l’esclave, ni le ministre, ni l’empereur. Il ne faut pas conclure que le stoïcisme est une philosophie démocratique. La démocratie, même si elle a été inventée par les Grecs ,ne doit pas être prise dans sa signification actuelle. Les choses se sont probablement faites de façon naturelle, les Grecs et les Romains de l’époque ont adhéré aux idées de leurs philosophes sans tenir compte de leur appartenance sociale ou de leur richesse ou de leur puissance. Cet élément doit être soulignée avec insistance, car dans notre période actuelle, un homme de basse condition a très peu de chances de voir aboutir sa pensée philosophique. Et même si c’était le cas, il serait complètement laminé par les médias et par d’autres philosophes ; ceux-là mêmes qui nous apprennent la tolérance.
Épictète était esclave dans l’Empire romain. C’était un homme simple qui a vécu de façon modeste. Tout un mythe s’est construit autour de lui et de sa placidité face au destin. Ainsi, a-t-on pu dire qu’il a supporté avec un incroyable détachement le fait que son maître lui fracture une jambe. Cela va donner, entre autres, naissance à cette légende selon laquelle les stoïciens supportent la douleur sans broncher. Je crois, à titre personnel, que cet épisode n’est pas véridique. Un homme peut difficilement supporter qu’on lui fracture une jambe, la douleur est très intense et peut conduire à la syncope. Je pense sincèrement qu’il s’agit là d’une fable qui s’est greffée sur le personnage pour l’élever au-dessus de la condition humaine. Il faut savoir prendre du recul avec ce genre de faits qui tiennent plus de la vérité mythologique, que de la vérité historique. Probablement les faits concernant Épictète sont un embellissement d’un événement ayant bien existé, mais beaucoup plus banal que ne le dit la légende.
On doit à Arrien, un disciple d’Épictète, l’essentiel de la pensée de son maître. Cet essentiel porte le nom de Manuel pour souligner le fait que les disciples d’Épictète se devaient d’avoir à portée de main (d’où l’expression manuelle) l’ouvrage de leur maître.

Sénèque, quant à lui, était précepteur du redoutable Néron, ensuite un de ses conseillers. Sénèque a vécu dans l’entourage des grands. Il a écrit beaucoup d’ouvrages, parmi lesquels les célèbres lettres à Lucilius. Il y a toute une tradition historique sur la vie de Sénèque. Honnêtement ce n’est pas ça le plus intéressant.

Marc-Aurèle  est l’âme la plus noble qui ait vécu. C’est une phrase d’Hippolyte Taine, un philosophe et historien français du XIXe siècle. Cette phrase qui n’est pas une complaisance envers l’empereur philosophe est le couronnement de la vie d’un homme qui n’a jamais pris en considération ni gloire, ni renommée, ni richesse.

Durant sa vie, Marc-Aurèle aura à affrontera des épreuves graves telles que la perte d’un nombre important de ses enfants. De plus, outre, les guerres, il aura à affronter sous son règne les tremblements de terre, les épidémies, les maladies. Il y a lieu de considérer que tous ces malheurs sont à l’origine de la profondeur de sa pensée.
 Son œuvre majeure est : Pensées pour moi-même. On dit qu’il a mis 10 ans pour l’écrire. C’était en fait des notes qu’il écrivait pour lui-même après une bataille, ou à chaque fois qu’il avait du temps à consacrer pour lui-même. Dans cette œuvre magistrale, on trouve toutes les grandes bases du stoïcisme.
Le manuel d’Épictète, les Pensées pour moi-même de Marc Aurèle, sont des œuvres majeures et incontournables pour comprendre la philosophie des stoïciens. Aussi, je vous invite à lire ces deux œuvres qui sont d’une écriture simple, claire, limpide.
Dans la prochaine vidéo, nous rentrerons de plain-pied dans l’univers fascinant du stoïcisme et de la pensée des stoïciens. Le manuel d’Épictète, ainsi que les pensées pour moi-même de Marc Aurèle seront les deux œuvres essentielles pour comprendre de façon claire ce que c’est que le stoïcisme. Sénèque, quant à lui, fera l’objet d’exposé à part.
D’ici là je vous dis au revoir et à prochainement.

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