Elle l’a emporté devant Lola Lafon avec "Chavirer" et Miguel Bonnefoy auteur d'"Héritage". "L’écriture est simple et touchante et sonne juste, sans lyrisme superflu. C'est un livre subtil qui permet d'observer la question du mariage forcé par le prisme de ce témoignage émouvant" a déclaré par visio-conférence Clémence Nominé, présidente du jury lycéen. Jury composé de 12 lycéens représentant leurs 2.000 condisciples qui préparent cette manifestation, 33e édition de ce prix soutenu par la Fnac et le ministère de l'Education nationale, de la jeunesse et des sports. Ce choix des lycéens a beaucoup touché Djaili Amadou Amal. Pour elle, cela signifie que les jeunes sont sensibles au sujet des violences faites aux femmes et c’est "un espoir pour l'avenir".
Son quatrième roman raconte le destin tragique de deux soeurs de 17 ans vivant au Sahel, Ramla et Hindou, mariées de force, la première à Alhadji Issa, un homme riche, et la deuxième à Moubarak, son cousin. Safira la troisième, plus âgée, est la première épouse d'Alhadji Issa et voit non sans crainte l'arrivée de Ramla dans son foyer. Dans "Les Impatientes", Djaili Amadou Amal reprend et retravaille un roman publié dans son pays en 2017 sous le titre "Munyal, les larmes de la patience", Munyal, mot peul qui signifie patience, qualité que l'on recommande à toutes ces femmes, un proverbe peul ne dit-il pas "Au bout de la patience, il y a le ciel"?
L’ouvrage a reçu le prix Orange du livre en Afrique ainsi que le Prix de la Presse Panafricaine de Littérature en 2019. "Les Impatientes", ce n’est nullement une autobiographie même si l'auteur s’inspire de sa propre expérience. Mariée de force à 17 ans à un quinquagénaire polygame qu’elle ne connaît pas, elle parvint à s’en séparer cinq ans plus tard. Le roman avait attiré l’attention lors de sa parution et son auteur figurait parmi les quatre finalistes du Goncourt.
Djaili Amadou Amal n’est donc pas une inconnue dans le monde de l’édition et ce n’est pas non plus la première fois qu’elle évoque la condition des femmes dans certains pays d’Afrique. Et cette fois, il s’agit de sa première publication en France. Et elle sait de quoi elle parle quand elle évoque la condition des femmes dans son Cameroun natal. Elle est née en 1975 à Maroua au nord du pays, peule et musulmane, elle est la fille d’une mère égyptienne et d’un père camerounais. Dix ans après avoir quitté son premier époux, elle se remarie mais est victime de violences conjugales. Elle peut échapper à l’emprise de cet homme, il kidnappe cependant ses deux filles pour la faire revenir. Elle arrive néanmoins à terminer une formation en gestion. Elle raconte comment pour survivre elle a dû vendre des bijoux de prix. Elle lit beaucoup et surtout écrit, ce qui la sauvera. Elle évoquera le sort de ces femmes obligées comme elle d'accepter les codes en vigueur dans la société patriarcale de cette région.
En 2010, ce sera "Walaande, l’art de partager un mari" aux éditions Ifrikiya, à Yaoundé, elle raconte l’existence de quatre femmes mariées au même homme qui attendent leur tour… Le livre est un succès de librairie au Cameroun. Djaïli Amadou Amal a créé en 2012 l’association "Femmes du Sahel" qui agit en faveur de l’éducation des filles de la région et dont le but est de "porter la voix des femmes du Sahel". On la surnomme "la voix des sans voix". "Le mariage précoce et forcé, le viol conjugal et la polygamie que Djaili Amadou Amal dénonce dans ses romans sont des maux qui entraînent d’autres violences et particulièrement économiques. La femme ne peut faire d’études et n'a pas de métier, elle reste donc dépendante toute sa vie sans pouvoir lutter contre ces violences. La romancière, malgré toutes les difficultés qu’elle a traversées a veillé à ce que ses filles fassent des études.
Djaïli Amadou Amal révèle qu’elle reçoit des messages de femmes des pays limitrophes du Cameroun qui lui racontent qu’elles ont vécu ce qu’elle décrit si bien et même pire… Dans un rapport de ces dernières années, on peut lire qu’au Cameroun et surtout dans le nord, on trouve des filles mariées de force avant leur 15e année, parfois plus de 20%.
Actuellement, Djaili Amadou Amal réside à Douala, avec son troisième époux, Hamadou Baba, un ingénieur originaire comme elle du nord du Cameroun. Il est également écrivain sous le pseudonyme de Badiadji Horrétowdo.
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