Les cadres veulent faire savoir leur refus de voir passer Ä‚ 235, contre 218 aujourd'hui, le nombre maximal de jours de travail par an comme le prÄ‚Švoit la réforme du temps de travail.
Plus d'un millier de cadres, techniciens et quelques ouvriers ont manifesté mercredi 23 juillet près du Sénat à l'appel de la CFE-CGC et l'Ugict-CGT, avant le vote d'une réforme du temps de travail jugée "archaïque, contreproductive" et "pas bonne pour les entreprises".
Une fois n'est pas coutume, un ballon blanc siglé CFE-CGC flottait aux côtés des fanions rouges de la CGT au-dessus de la place de l'Odéon, a constaté une journaliste de l'AFP. Une partie des manifestants s'étaient vêtus de noir, portant par avance le deuil de leurs jours de RTT.
"On est dans une dynamique pour traduire le mécontentement contre ce projet de loi qui cible particulièrement les cadres et veut en faire la référence dégradée pour l'ensemble des salariés", a souligné Marie-Jo Kotlicki, secrétaire générale de l'Ugict-CGT, à l'origine d'une pétition qui a recueilli "4.000 signatures en une semaine".
"C'est vraiment la fin des 35 heures à partir du moment où on retire toute possibilité d'avoir des journées de réduction du temps de travail, et 70% des cadres étaient heureux de pouvoir les prendre", a ajouté Bernard van Crayenest, président de la centrale des cadres, la CFE-CGC.
"Les salariés savent souffrir mais jusqu'à un certain point. L'encadrement en général ce sont de bons soldats, de bons officiers, mais quand on met trop la pression, ils risquent de déserter d'une manière ou d'une autre, et ce ne sera bon ni pour l'économie, ni pour nos entreprises", a-t-il prévenu.
Mercredi matin, la CFE-CGC avait acheté des encarts publicitaires dans la presse pour une lettre ouverte à Nicolas Sarkozy afin "d'exprimer tout le malaise d'une population laborieuse qui souffre, fut-elle de l'encadrement".
"Ma vie privée, j'y tiens", "Il y a une vie après le travail", indiquaient des pancartes.
Le rassemblement allait plus loin que les seuls cadres. Mario Diego, 53 ans, ouvrier ajusteur chez Alstom Power service, a indiqué qu'il craignait que dans son entreprise, après les techniciens, ce ne soit au tour des ouvriers de passer au forfait jours.
Les cadres veulent faire savoir leur refus de voir passer à 235, contre 218 aujourd'hui, le nombre maximal de jours de travail par an. Par négociation, ces plafonds pourront même être portés jusqu'à 282 jours.
Les deux syndicats réfléchissent à "faire converger" leurs opérations tandis que les autres organisations, tout aussi opposées à la loi, ne manifesteront pas. Toutes enregistrent pourtant un afflux de messages d'inquiétude et de colère. La CFDT-Cadres fait état de connexions à son site internet "multipliées par mille en une semaine" sur le sujet. Mais la CFDT et Force Ouvrière doutent de l'efficacité d'une manifestation en plein été. La CFDT préfère donc tenir une conférence de presse ce même jour pour "informer concrètement sur le texte". "Etre 150 avec trois drapeaux devant le Sénat ? On préfère avoir un débat et informer", explique Laurent Tertrais (CFDT-Cadres). "Ce n'est pas au Parlement que ça va se jouer maintenant. Il faut trouver des réponses efficaces pour empêcher dès la rentrée toute renégociation du temps de travail", considère Eric Pérès, de FO-Cadres. "On est en train d'organiser, avec les syndicats, le rapport de force dans les entreprises", assure-t-il, estimant que "les pouvoirs publics et le Medef ont fait une grosse bêtise en se mettant à dos les cadres".
Le président de la CFE-CGC, Bernard van Craeynest juge au contraire "nécessaire, même symboliquement et surtout pour une organisation comme la (sienne) qui n'est pas une acharnée des manifestations, de montrer le mécontentement des cadres" par un rassemblement. Un plafond à 235 jours "correspond, en fait, à travailler une année pleine (365 jours) de laquelle on retire les jours de congés (25), les samedis (52), les dimanches (52) et le 1er mai !", explique depuis des semaines la CFE-CGC. "Comme souvent, les cadres sont premiers dans l'expérimentation, mais cela peut toucher tout le monde", prévient Marie-Josée Kotlicki (Ugict-CGT).
Le projet de loi prévoit en effet la possibilité d'étendre aux autres catégories de salariés le principe des forfaits-jours par une négociation de gré à gré.
Dispersés pour le moment, les organisations semblent en revanche unanimes pour agir de concert à la rentrée. A la CFDT, on annonce une journée d'action intitulée "Les cadres se rebiffent".