Nicolas Barré écrivait ceci, vers 1670, sur l'âme anéantie en Dieu :
"Qu'est-ce qui se passe dans soi ?
par quels désirs, par quelles lois,
Elle vit ainsi consumée,
elle ne peut pas le savoir.
Et l'amour qui l'a transformée
ne lui permet pas de le savoir.
Elle est sans yeux, elle est sans vie,
elle n'a plus de sentiment,
de désir, ni de mouvement.
Hors d'elle-même, en Dieu ravie,
Mais ravie d'une façon
dont il ne se fait point leçon
Dans tous les traités de l'extase.
ce n'est plus un ravissement
Qui violente et qui embrase :
c'est un anéantissement."
Le Cantique spirituel, 17-18
Cette dernière phrase est vitale. Après l'extase, le vide. Et du coeur de l'abyme, un nouveau ravissement. Dans le désert, autre un printemps. Puis un autre hiver, encore plus rude, une sècheresse plus aride. Puis les sèves reviennent... Et ainsi de suite. La vision bienheureuse est une chute sans fin dans une mer sans fond.