je sais
des années et des années sont passées
et je n’ai point essayé de me convertir
à la vie
je l’ai vécue
comme une parodie
même quand autour de moi
il pleuvait des tragédies
comme si j’avais été au cœur de la tornade
bien que
ma propre mort
m’ait toujours serré la main
avec fidélité
les grands mécanismes
continuent de moudre
du vieux sang
ou du sang frais
mais je n’en ai cure
je regarde le monde par le même hublot mat
comme à la naissance
je ne suis qu’un touriste âgé
au degré zéro
d’adaptabilité
et si mon univers est plus beau que le vôtre
je ne sens pas le besoin
de m’en excuser
en définitive
vous pourriez à tout moment jouer
dans mon cerveau
qui a commencé à fleurir
comme une horloge
en train
de sonner
***
Paul Vinicius – La chevelure blanche de l’avalanche (Jacques André Éditeur, 2019) – Traduit du roumain par Radu Bata.