Une histoire mondiale des femmes photographes
Publié le 12 novembre 2020 par Aicasc
@aica_sc
Couverture, photo de Pushpamala N.
crédits photo Pushpamala N.
500 pages
300 femmes photographes
164 plumes uniquement féminines
Voilà en quelques mots une présentation succincte du dernier ouvrage que viennent de publier les éditions Textuel sous la direction de Luce Lebart et Marie Robert : Une histoire mondiale des femmes photographes.
Luce Lebart est historienne de la photographie, commissaire d’exposition et correspondante française pour la collection Archive of Modern Conflict. Elle a été directrice de l’Institut canadien de la photographie de 2016 à 2018 après avoir dirigé les collections de la Société française de photographie de 2011 à 2016. Ses recherches portent sur la photographie d’archive, l’histoire des techniques et les pratiques scientifiques et documentaires de l’image. Elle a notamment été commissaire de : Souvenirs du sphinx et Lady Liberty aux Rencontres d’Arles ; Illuminations (Foto/Industria, Bologne) ; Frontera (musée des Beaux-Arts du Canada) et Gold and Silver (MBAC et FOAM Amsterdam, 2018). Elle a publié plusieurs livres parmi lesquels Les Grands Photographes du XXe siècle (Larousse, 2017).
Marie Robert est conservatrice en chef au Musée d’Orsay. Autrice d’une dizaine d’accrochages présentant la collection selon une approche socio-historique comme Misia, reine de Paris ( 2012), Splendeurs et misères. Images de la prostitution (2015), Qui a peur des femmes photographes? (2015). Ses recherches portent sur la place des femmes dans l’histoire de la photographie ainsi que sur les relations de la photographie avec d’autres médias.
Ce livre s’inscrit dans le travail de recadrage des relectures féministes de l’histoire de l’art amorcé ces dernières quarante années. En effet jusque là, peu de femmes photographes figuraient dans les anthologies. Et on ne comptait qu’un petit nombre de monographies consacrées à la photographie des femmes. Il s’agissait donc d’écrire une autre histoire et différemment.
L’objectif est de rendre compte la pratique des femmes photographes à travers le monde depuis l’origine de la photo jusqu’à la fin des années 1990. L’ordre de présentation respecte un ordre chronologique à partir de la date de naissance des artistes. L’année 1799 pour la première d’entre elles. Une notice de cinq cents mots et une image pour chacune. Cinq portfolios instaurant un dialogue entre différents clichés proposent comme une respiration.
On retrouve des artistes très connues : Denise Colomb, Diane Arbus, Hannah Höch, Claude Cahun, Dorothea Lange, Hilla Becher, Sophie Calle, Nan Goldin, Valérie Belin, Sophie Ristelhueber, Marta Maria Perez Bravo, Carrie Mae Weems, Cindy Sherman, Tracey Moffat, Shirin Neshat , Zanele Muholi, Angèle Etoundi Essamba….
Mas on va aussi de découvertes en découvertes.
Felicia Ansah Abbam, née en 1935, considérée comme la première femme professionnelle du Ghana dont les oeuvres ont été exposées en 2019 dans le premier pavillon du Ghana à la Biennale de Venise.
La première professionnelle du Proche-Orient, Marie- Lydie Bonfils, née en 1837 active au sein du studio Bonfils à Beyrouth.
La première lanceuse d’alerte, Alice Seeley Harris, née en 1870 avec son cliché de 1904, Nsala devant les restes de sa fille, Boali, tuée et mutilée lors d’une expédition punitive. C’est un cliché qu’elle a projeté à la lanterne magique en Grande – Bretagne et aux Etats – Unis pour alerter l’opinion publique internationale sur les atrocités perpétrées au Congo.
Même l’Impératrice Cixi de Chine a utilisé la photographie et conçu une série de portraits, par elle mis en scène, pour promouvoir son image.
Illustration du manque de visibilité des femmes, il y a aussi les épouses d’artistes célèbres qui ont épaulé leur conjoint tout en développant dans l’ombre leur propre pratique artistique : Sofia Tolstaïa, femme du célèbre écrivain Tolstoï mais aussi Constance Talbot et Lucy Moholy Nagy.
Il y a d’audacieuses exploratrices, Emma Jane Gay qui a vécu dans la tribu des indiens Nés percés entre 1880 et 1881. Ou Jane Dieulafoy qui a réalisé des relevés et des clichés architecturaux en Perse un peu à la même période. Et encore Géraldine Moody dans l’Arctique et Edith Watson qui a sillonné le monde en quête d’images.
Il y a aussi de courageuses reporters de guerre, Alice Schaleck et Nina Jorpadze pendant la Première guerre mondiale ; Thérèse Bonney et Galina San’ko pendant la Seconde, Semila Es en Corée, Vietnam et Rwanda, Catherine Leroy au Vietnam.
Deux fiches, Arlette Rosa- Lameynardie pour la Martinique et Renée Cox pour la Jamaïque, rédigées par Dominique Brebion, reflètent la pratique de femmes photographes de la Caraïbe dont la carrière s’est développée avant la fin des années 1990.
C’est un ouvrage où l’on peut voyager indéfiniment sans jamais répéter le même parcours : scènes familiales, portraits, reportage social, photographie plasticienne, images de guerre du monde entier, Chine, Algérie, Inde, Australie, Nouvelle Zélande, Lettonie, Palestine, Cuba … Pour les spécialistes et les étudiants une formidable bibliographie complète l’ensemble.
Chacun retiendra en fonction de sa sensibilité telle image ou telle autre. Un photocollage associant aquarelle et tirage de Lady Frances Jocelyn daté de 1860 frappe par sa conception et son allure très contemporaines. La composition audacieuse Gargouille de Gertrude Käsebier retient l’attention surtout lorsqu’on la resitue dans son année de réalisation, 1901. Les clichés de Sandra Elita, Miyako Ishiuchi, Graciela Iturbide, Angela Etoundi Essamba, Shadi Ghadiran marquero,t et enchanteront votre première lecture. .