La fin des Irin est un roman graphique disponible sur le net et propose dans son premier tome de découvrir des paraboles théologiques à même de faire trembler nos conceptions occidentales.
De l'antiquité à nos jours, Les dieux et frères Yahweh et Baal s'opposent depuis la nuit des temps. Pourtant, l'affrontement pourrait finalement bien tourner en faveur des pauvres humains. Webcomic accessible depuis le site officiel, La Fin des Irin est une odyssée à travers l'histoire hébraïque où l'intrigue trouve finalement ses origines dans la science-fiction. Un résultat original mais déstabilisant.
Écrit par Rob McMillan et illustré par Wouter Gort, dans le premier tome qui change de dessinateur pour chacun des volumes de cette trilogie graphique, La Fin des Irin offre à ses lecteurs de nouvelles planches tous les mercredis pour que vous puissiez lire l'œuvre gratuitement. Il fallait le souligner avant de tenter d'analyser cette virée dépaysante au sein des légendes bibliques.
Le codex contient la vérité nue.
Il convient également de signaler que cette bande-dessinée à destination d'un public averti perturbera par son fil narratif non linéaire. Plusieurs histoires se chevauchent, chacune pour mettre en exergue l'affrontement dantesque entre les deux divinités, représentant le polythéisme conservateur pour le " démon " Baal et le monothéisme attrayant de Yahweh. On se passera de commentaire sur le sous-texte mais entre les origines antiques des dieux, la transposition dystopique de leur affrontement galactique et les mésaventures d'une humaine " choisie " au beau milieu de toute cette théologie, on a tendance à s'y perdre.
Entre allers-retours, flashbacks, paraboles méta ou métaphores sur la religion et le destin de l'humanité perdu dans une lutte inégale, la lecture souffre de cette complexité. D'autant plus que l'auteur décide aussi d'ajouter en pied de page des informations pour étayer cette fiction de faits historiques ou un arbre généalogique pour aider à la lecture, au demeurant passionnante, mais loin d'être aisée de La Fin des Irins. Parce qu'en plus de l'évidente référence à la religion judaïque, de nombreux sujets viennent apporter de belles considérations à l'œuvre, de la différence du handicap au manichéisme éternel, on nage dans l'iconoclasme le plus savoureux.
©lastoftheirin.comSi le roman graphique tend à perdre le lecteur dans une histoire qui manque de dynamisme visuel où les onomatopées se fondent assez durement avec les illustrations, ces dernières constituent paradoxalement une œuvre précise et délicieuse. Illustré numériquement, ce digital painting de qualité opère par un style presque minimaliste ou certaines cases emplies d'aplats de couleurs primaires offrent un rendu abstrait qui vient contraster avec le cel shading et les détails incroyables du design de vaisseaux spatiaux ou la violence des rapports sexuels, presque bestiaux, à l'origine de toute cette histoire. Une oeuvre pour public averti on disait.
Face à toute cette pureté visuelle et narrative, dommage que la lecture de La Fin des Irins pâtisse de ne pas être plus aérée, son ambition plus cadrée. Mais peut-être qu'il fallait bien ça pour s'aventurer dans un dédale spirituel de ce calibre.
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