En raison des conséquences sanitaires et sociales de la consommation excessive d’alcool, la Coalition nationale contre l’alcoolisme s’attaque à ce phénomène.
Elle vient de lancer à Yaoundé une campagne de prévention à la consommation abusive d’alcool en milieu jeune et dans les communautés. « Le problème est sérieux », prévient Louis-François Ovono Noah, Coordonnateur régional pour le Littoral de la Plateforme Camerounaise du Commerce équitable (P2CE) au cours d’une conférence de presse donnée hier jeudi 5 novembre 2020 à Yaoundé. Cette rencontre marque le lancement de la campagne de prévention à la consommation abusive d’alcool en milieu jeune et dans les communautés, par la Coalition nationale contre l’alcoolisme en collaboration avec le P2CE et le Pôle des Addics pour l’intérêt économique et social du Cameroun (Paies). « En milieu jeune, la consommation d’alcool se pose avec acuité », insiste-t-il avant de citer les résultats d’une enquête réalisée en 2017, qui situent le taux de consommation d’alcool chez les cop’s à 87,93% (soit 60,96% chez les garçons et 39,04% chez les filles). « Ces résultats sont semblables à ceux retrouvés en 2006 auprès de 1017 élèves issus de 5 établissements d’enseignement secondaire dans la ville de Yaoundé qui révèlent que la plupart (52,09%) des étudiants étaient des consommateurs mixtes de boissons alcoolisées ».
Déperdition scolaire, tendance à la violence et au crime, perte des valeurs morales sont quelques conséquences sociales de la consommation excessive de l’alcool par les jeunes. Sur le plan sanitaire, les experts présentent l’alcool comme un produit psychoactif – c’est-à-dire qu’il agit sur le fonctionnement du cerveau en modifiant la conscience et les perceptions donc le comportement. Il est cité parmi les facteurs majeurs de risque des maladies non transmissibles (hypertension, diabète, etc.) en nette croissance au Cameroun où les MNT sont responsables de 239 000 décès chaque année (35% des décès annuel selon l’Alliance de la Société civile Camerounaise sur les maladies non transmissibles. Outre l’ivresse qui se traduit par une mauvaise coordination des mouvements, une élocution troublée, diminution des réflexes et de la vigilance, la consommation de l’alcool peut également entraîner des pertes de mémoire allant jusqu’au trou noir et au coma éthylique qui peut conduire à la mort.
Une législation poreuse Dans les ménages, l’on attribue à l’alcool l’incapacité à honorer aux obligations familiales (éducation des enfants, gestion financière) ; les violences conjugales ; l’atteinte à l’intégrité psychique et psychologique des enfants… Pour la société, l’on évoque la perte de la main d’œuvre productrice, l’explosion des maladies dues à l’alcoolisme, l’insécurité grandissante, la dépravation des mœurs, etc. Une enquête réalisée en 2004 au Cameroun et à Madagascar situe la prévalence de consommation excessive d’alcool autour de 11% dans la population générale. Des statistiques à revoir probablement à la hausse au regard du phénomène en milieu jeune. « Tout ceci est lié à la faiblesse du cadre juridique national », fustige Prince Mpondo, membre de la Coalition contre l’alcoolisme. L’expert en communication constate pour le déplorer que 14 ans après, les textes règlementaires prévus par la Loi de 2006 sur la publicité au Cameroun ne sont pas toujours adoptés par les autorités compétentes.
Pourtant la publicité est l’un des facteurs majeurs qui favorise la consommation excessive de l’alcool en milieu jeune. « Il y a lieu de légiférer par un décret qui fixe le régime de la publicité sur l’alcool et les boissons alcoolisées dans les médias (presse écrite, Internet, radio, télévision), l’objectif étant d’interdire la publicité en faveur de l’alcool… ». Au même titre que la publicité, observe Marie Hélène Ebieline, la promotion des ventes occupe une place de choix dans les activités commerciales et marketing de l’industrie brassicole. « Les jeux concours sont un facteur aggravant de la consommation d’alcool », dénonce l’experte en protection des consommateurs qui suggère l’adoption d’un texte pour encadrer les loteries commerciales sur l’alcool. A ce propos, la campagne suscitée comporte un volet plaidoyer auprès des administrations concernées et des parlementaires en vue du renforcement de l’arsenal répressif ; la sensibilisation des jeunes sur les méfaits de l’alcoolisme sur une période d’un an (de novembre 2020 à novembre 2021). « L’objectif de cette activité est de contribuer à la réduction de la prévalence de l’alcoolisme en milieu jeune et communautaire à travers des mesures réglementaires adéquates », précise Mbida Ndoumbe, Coordonnateur national du P2CE.