Ce jeudi est un jour comme les autres pour Steven et ses collègues. Voilà quinze jours qu'ils ont entamé un chantier au cœur de Bordeaux. Il s'agit de repeindre les 1600 m 2 d'un toit recouvrant un parking. Une toiture en fibrociment dangereuse cependant, car outre le danger de l'amiante, les plaques qui la composent sont particulièrement fragiles.
La pause-déjeuner terminée, le jeune ouvrier rejoint son poste de travail. Après une formation de charpentier naval, il avait passé un CAP couvreur-zingueur. Fort d'une expérience d'une dizaine d'années dans le bâtiment, il venait d'être embauché en CDI sept mois plus tôt par l'entreprise chargée du chantier. Les conditions de travail ne l'enthousiasmaient guère mais Steven allait devenir papa et ne pouvait pas se passer de cet emploi.
De retour sur le toit, Steven s'arme de son balai et se met à l'œuvre. " Et là, c'est le drame " raconte Sarah, sa sœur. " Son collègue entend des bruits de craquement puis viennent la chute et les cris ". Steven traverse la toiture. Non harnaché, il retombe cinq mètres plus bas sur le sol en béton du parking. " Les pompiers sont arrivés très vite. Mais malheureusement un hématome s'était formé sur toute la partie gauche de son cerveau ".
Le lendemain, le chantier reprend. Transporté au CHU de Bordeaux, Steven lutte lui pour survivre. Mais son cerveau a manqué trop longtemps d'oxygène et est terriblement endommagé. Le 24 septembre 2020, " après huit jours de combat on a dû tout arrêter car le destin en avait décidé ainsi. Il ne se réveillera pas. " Un terrible drame pour toute la famille, d'autant que Steven s'apprêtait à devenir papa...
L'enquête de l'inspection du travail devra déterminer si les conditions de sécurité étaient respectées sur le chantier. Tous les ouvriers avaient-ils la possibilité d'être harnachés ? Qu'en était-il de l'évaluation concernant la dangerosité de la toiture et la présence d'amiante ? Une plainte pour homicide involontaire a d'ores et déjà été déposée par la famille de la victime.
Comme trop souvent, les médias ne se sont pas faits écho de ce drame du travail. Certains avaient pourtant été contactés par la famille. " Il est passé complètement dans l'oubli... " déplore sa sœur. " C'est un désastre. Comment est-ce possible que des travailleurs passent à ce point dans l'oubli ? Mourir sur son lieu de travail ce n'est tout de même pas normal. "