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(Anthologie permanente) Pierre Garnier, Perpetuum mobile

Par Florence Trocmé


Garnier-perpetuum-mobileLes éditions L’herbe qui tremble, qui ont publié de nombreux livres de Pierre Garnier, proposent aujourd’hui Perpetuum mobile.
En voici l’introduction, signée de Pierre Garnier lui-même et quelques extraits.
Présentation
« Ce livre de poèmes montre l'influence du spatialisme sur (ma) poésie : en effet il ne s'agit pas cette fois-ci de textes visuels ou acoustiques mais de poèmes brefs, faits parfois de quelques mots, qui nous entraînent dans un mouvement perpétuel au fil de la vie aperçue, suivie, interrogée, dite, de la façon la plus objective possible.
Ces textes forment un courant qui progresse de page en page ; il s'agit de touches, de notations plus que de développements, de reflets, de mouvements qui prennent dans leur sillage le monde, les bêtes, les plantes, les souvenirs d'enfance et d'adolescence et les transportent en poésie.
Ces poèmes, dont l'économie est due à l'influence de la poésie concrète, sont souvent la confrontation de deux idées ou de deux images qui déclenchent, chez le lecteur, l'éclair poétique et ne retirent rien au mystère qui affleure. Le long du film poétique file, sous-jacente, l'interrogation sur les langages et leurs poésies : quels rapports entretient le poème avec le monde, avec les hommes ? La réponse est peut-être dans ce mouvement sans cesse repris et qui s'étend, ce Perpetuum mobile.
Pierre Garnier

Extraits
La mort
est si calme
en pleine mer.
(p. 11)
*
La lune
ne ressemble-t-elle pas à notre poésie ?
si morte
si claire ?
(p. 13)
*
Le poème
Est-ce moi, ombre chinoise,
qui fais ces gestes minuscules derrière l’écran ?
(p. 22)
*
Ces royaumes
continuent à filtrer
à travers leurs millions de morts
Plusieurs siècles après, on les trouve à la
même place dans les géographies
Mais les arbres s’en soucient peu
qui continuent à pousser
à travers ces royaumes
et leurs millions de morts.
(p. 28)
*
L’oiseau
se consume
en oiseau
Il y a des cris dans le ciel.
(p. 39)
*
Restent des échelles couchées
les anges voletant dans le ciel
et Jacob la faux en aile
coupé combat
un soleil de paille en angle
La terre
tourne noire.
(p. 82)
*
Que répondre
à mon avenir —
os pierres nerfs poussières ?
Je sais comment tout vole encore
quand les ailes sont brisées.
(p.103)
Pierre Garnier, Perpetuum mobile, L’herbe qui tremble, 2020, 178 p., 14€
Réédition d’un livre paru en 1968 et épuisé, Perpetuum mobile est un moment charnière dans le travail poétique de Pierre Garnier. Il marque le retour du poète vers une poésie linéaire, qu’il avait délaissée pour se consacrer au spatialisme, poésie visuelle qu’il avait inventée avec son épouse Ilse Garnier au début des années 1960.
Pierre Garnier (1928-2014) fut avec son épouse Ilse l’un des pionniers et des grands propagateurs de la poésie spatialiste, dite aussi poésie concrète, qui connut un rayonnement international, du Brésil au Japon. Son œuvre poétique est considérable et la réunion en cours de ses œuvres complètes compte déjà plusieurs volumes. Il fut aussi l’auteur de Spatialisme et poésie concrète (Gallimard, 1968), premier ouvrage théorique et anthologique sur le mouvement.


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