Elle fait moins la maligne, l’ostensible vacuité, sous la plume de Nick Tosches.
Il la plante là, dans quelque restau huppé de capitale occidentale, engorgée de sa suffisance adipeuse, déblatérant encore ses fausses éruditions. Il la flingue en quelques pages et déjà le plaisir s’échauffe, alerté par l’humour glacial intimement salvateur.
Pour se remettre à l’endroit, Nick Tosches retourne la terre et part en épopée.
Qu’on ne s’y trompe pas ; il n’est question ni d’hallucinations foudroyantes, ni du témoignage écorché d’un héroïnomane rescapé de l’enfer.
L’opium est volupté. Il vient du fond des âges. Il séduisit les dieux, baptisa des cités et dicta ses rituels en grec et en latin. Il impose son rythme et choisit ses outils, au maniement fragile. Le chasseur romantique, exigeant, obstiné, s’est éduqué au raffinement grandiose de la poésie d’Homère. Il traque une fumerie de velours silencieux et de courtisanes alanguies. Il suit la piste érotique de la sérénité. Il attend patiemment dans les bordels chinois et les bouges thaïlandais, suit ses guides obscurs et laconiques dans le dédale des réseaux et des ruelles brûlantes. Il ignore les appels des drogues aguicheuses et offertes, peut-être ceux, aussi, des innombrables prostituées, dociles, grouillantes, étonnées de sa quête hors d’âge.
Ses mots sont délétères et envoûtants. Et vous ne le lâchez plus. Il ne lâche plus non plus.
On glisse.
Nick Tosches naît en 1949 dans le New Jersey.
Un peu plus tard, il se met à écrire, à fumer, à boire, et à aimer Faulkner.
Ses livres sont publiés en français aux très jolies éditions Allia.