Térébenthine, de Carole Fives (éd. Gallimard)

Un article d’une revue d’art ouvre le premier chapitre du livre qui se conclut par la mort de Luc. Et c’est cette disparition qui est au coeur du roman. Vous croyez entrer dans une thèse sur l’art contemporain mais c’est de trois ami.e.s qu’il s’agit. Trois qui n’ont pas vingt ans et pensent qu’une école d’art leur permettra de réaliser leur désir : être artiste. Mais le monde de l’art n’est pas différent de la société dans laquelle il évolue. La mode n’est plus à la peinture mais à l’art conceptuel et les esprits étroits ne peuvent jurer que d’un style à la fois. Donc exit la peinture. On parle désormais de médium. Mais aussi, pas de place pour les femmes que l’enseignement dispensé dans l’amphithéâtre néglige outrageusement. D’ailleurs, ce sont les mêmes qui ironisent sur la peinture et les femmes. Quand on est jeune, confronté à l’arrogance des générations précédentes, on peut vouloir combattre avec ses propres arguments, refuser par exemple la norme installée, ou tenter d’y creuser un sillon différent. Trois jeunes, Luc, Lucie et la narratrice, vont subir cette violence d’un enseignement qui ressemble plus à une volonté de domination qu’à l’attention portée à la créativité des étudiant.e.s. Comment s’en sortir ? Car il s’agira de s’en sortir, d’une manière ou d’une autre. Et l’amitié peut-elle résister quand chacun.e choisit une voie différente ? 

C’est après le suicide d’un de ses professeurs que Carole Fives a commencé ce livre dans lequel elle cite L’oeuvre, livre d’Émile Zola, dont le personnage principal, Claude Lantier, se suicide devant sa toile. Hommage donc à ce professeur, à l’amitié, à la littérature et à la peinture, un art vivant.

Carole Fives était invitée le 9 octobre, avec Dorothée de Monfreid, par Dominique Quelen, à la Librairie Texture, à Paris.