L’Amazonie est en grand danger mais les multinationales françaises de la grande distribution, dont Carrefour et Casino, continuent de s’approvisionner en viande dans des fazendas amazoniennes…
Au printemps dernier, le site Mediapart révélait les pratiques du géant de l’industrie de la viande JBS en Amazonie qui représente environ un quart du marché mondial du bœuf. JBS distribue principalement des produits à base de viande (essentiellement du bœuf mais aussi du poulet et du porc), soit fraiche, soit réfrigérée. Il exporte vers près de 110 pays.
Basé à São Paulo, le groupe fut fondée en 1953 à Anápolis, dans l'État de Goiás et possède des usines notamment au Brésil, en Argentine, aux États-Unis et en Australie. Il est impliquée actuellement dans plusieurs affaires de corruption au Brésil.
Malgré ses engagements, le groupe brésilien continue de travailler avec des fermes impliquées dans la déforestation. Or, JBS fournit les rayons boucheries des magasins Carrefour et Casino au Brésil, les deux entreprises françaises étant très implantées sur le marché latino-américain.
Près de la moitié du chiffre d’affaire du groupe Casino est réalisé en Amérique du Sud. Le groupe français détient 15 % du marché de la grande distribution au Brésil, avec les enseignes de supermarchés Pão de Açúcar, et 43% en Colombie avec sa filiale Éxito.
Des abattoirs et distributeurs qui ferment les yeux sur les pratiques de blanchiment de bétail
L’ONG française Envol vert a publié un rapport sur Casino qui révèle l’existence de liens concrets entre quatre fermes impliquées dans la déforestation illégale en Amazonie brésilienne et les produits vendus dans les supermarchés du groupe Casino.
Une coalition internationale d’associations (Canopée, Envol Vert, Mighty Earth, Notre Affaire à Tous et Sherpa) et d’organisations représentatives des peuples indigènes de Colombie et du Brésil s'est saisi de ce problème et mis en demeure le groupe Casino de prendre les mesures nécessaires pour exclure le bœuf issu de la déforestation de sa chaîne d’approvisionnement au Brésil et en Colombie. « Elle se réserve également le droit de solliciter la réparation des préjudices qui en découlent », précise la coalition dans un communiqué de presse.
Au regard des chiffres de la déforestation de l’Amazonie, le temps presse. Sur la période d’août 2019 à juillet 2020, plus de 9200 km2 - une superficie équivalente à la Corse - ont été déboisés en Amazonie brésilienne, soit un tiers de plus que durant la même période l’année précédente (selon les données de l’Institut national de recherche spatiale brésilien).
L’élevage bovin est la cause principale de la déforestation de l’Amazonie, souligne Envol vert. Les abattoirs et des distributeurs « s’approvisionnent régulièrement en viande bovine provenant de zones récemment déforestées » et « ferment les yeux sur les pratiques de blanchiment de bétail visant à contourner la législation brésilienne », ajoute l’ONG.
Casino doit adopter un nouveau plan de vigilance
Avec cette mise en demeure, la coalition d’ONG veut « obliger Casino à adopter un nouveau plan de vigilance », explique Sébastien Mabile, avocat de la coalition internationale d’associations.
Depuis 2017, la loi française sur le devoir de vigilance impose aux multinationales françaises de prendre des mesures pour prévenir les atteintes graves aux droits humains, à l’environnement et à la santé et à la sécurité des personnes résultant de ses activités, de celles de ses filiales, fournisseurs et sous-traitants.
« Casino a adopté un plan de vigilance qui identifie certes les risques liés à la déforestation, mais nous estimons que ces éléments sont insuffisants. L’enquête d’Envol vert montre bien que de la viande issue de zones déforestées se retrouve malgré tout dans les étals de Casino au Brésil. » poursuit l’avocat.
Les ONG demandent notamment au groupe français « d’établir une cartographie présentant, analysant et hiérarchisant les risques d’atteintes graves résultant de l’approvisionnement des filiales de Casino en Amérique du Sud en viande de bœuf » et « d’évaluer publiquement et régulièrement l’efficacité et l’effectivité des mesures de vigilance ».
Cette mise en demeure est une première étape avant de lancer un contentieux judiciaire. Si Casino n’agit pas dans les trois prochains mois, la coalition internationale d’associations est bien décidée à attaquer le groupe en justice...
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