Ce n’est pas sans joie que je suis rentré dans la voiture rouge de ce vieil homme qui prenait la route pour la Suède, en passant donc par Kautokeino. La voiture empestait le poisson séché, qui d’ailleurs à atterri sur mes genoux…
“Prenez-en si vous voulez”. Le vieil homme est adorable, il parle peu. Ne semble pas pouvoir tout faire à la fois: conduire et parler. Son visage est Sàmi, je suis sur qu’il l’est. Je lui dit que j’étudie les Sàmis. Il ne bronche pas, nous roulons.
Puis, après 20 minutes de silence, alors que nous longeons la rivière d’Alta qui loge l’énorme barrage, source de conflit entre les Sàmis et les Norvégiens dans les années 70, il me dit
“Il y a 7 ans, par coincidence, je suis allé chercher les traces de mon grand-père par mon nom. J’ai découvert qu’il était de Suède du Nord et qu’il a émigré au 19e siècle en Norvège, sur la côte, là où j’ai grandi. Il était Sàmi. Sa famille élevait des rennes en Suède et ils sont devenus pêcheurs en Norvège. Mon père était donc pêcheur aussi et mes parents nous ont toujours cachés qui nous étions…En surface nous étions Norvégiens, seulement en surface…
Puis nous n’avons plus parlé le reste du chemin. Les montagnes ont diminué pour faire place à la toundra du plateau appelé Finmark Vidda qui est au Nord de Kautokeino.
Je suis arrivé au camping de Kautokeino, LA ville Sàmi, par un grand soleil - enfin! - et j’ai retrouvé Alexandre, le Catalan que j’ai rencontré au Riddu Riddu Festival. J’ai planté ma tente et ai découvert l’horreur: les moustiques. Des trentaines de moustiques volaient au-dessus de moi, j’avais beau bouger, ils restaient là ! J’ai mis ma citronelle, ça a calmé le jeu, mais je comprends mieux maintenant pourquoi la ville est déserte et que tous les rennes migrent vers la côte : ils fuient les mosquitos ! Ils sont vraiment très agressifs et plus gros que ceux que je connaissais… Bon, je ne sais pas si je vais rester longtemps ici. D’autant que je n’ai pas de news de Jonna Utsi, le jeune éleveur de rennes que je devais rejoindre dans les montagnes…
En tout cas Kautokeino est un village très petit, avec peu d’urbanisme, c’est simplement des bâtiments et des maisons posés comme ca. Y’a personne dans les rues, drôle d’ambiance…
Avec Alex le soir, nous sommes allés faire de la musique chez un pote à lui, un jeune Sàmi qui habite dans les Lofotens. Il m’a raconté qu’il n’a pas vraiment bien vécu sont enfance ici, qu’il ne parle pas Sàmi, que ses parents l’ont mis dans une classe Norvégienne et que les autres enfants étaient assez cruels avec lui. Intéressant comme vision : les enfants sont toujours le reflet des parents. Cette génération qui a grandi avec des parents militants pour la culture Sàmis dans les années 80, sont donc devenus très radicaux pour retrouver leur identité, même avec des Sàmis fricottant trop avec les Norvégiens…
Je rentre seul et me pose dans le Lavvu du camping pour méditer, un jeune arrive pour y déposer des peaux de rennes.
Je me couche tôt car je veux avoir la pêche pour demain, y’a un concert de Joïk dans le Lavvu suivi d’un concert de musique Irlandaise dans un bar. En pleine nuit je me lève pour aller aux toilettes et voila ce qu’il y a devant moi, un coucher/lever de soleil à 2h du mat :