Lors de notre dernier rendez-vous pédiatre, elle m'a dit " vous pourriez presque écrire un livre non, vous finissez par connaître le reflux... " En effet, après trois bébés avec RGO pathologiques, je peux écrire peut être pas un livre mais au moins un article sur le sujet ! Bon, des articles là dessus je vous en ai écrit plein, des bilans âge par âge, des récapitulatifs... Mais cette fois j'avais surtout envie de vider mon sac.
Parce que même si on connaît, même si on est rodés, même si on sait que ça passe, le rgo en plus des autres petits maux de bébés, ça vous pourrit la vie. Vraiment.
- Le RGO, ou comment ajouter du piment à sa vie de parent,
- Le RGO de Liloute, un an après,
- Liloute, le lait de vache et le RGO,
- Le retour du RGO, ou comment le RGO de Miniloute est apparu quasiment dès la naissance,
- Le RGO de Miniloute, un an après,
- Le RGO de Miniloute, 2 ans après,
- Le RGO de Miniloute, 2 ans et demi après, bilan sur le sevrage d'inexium,
- Le RGO de Miniloute, presque 3 ans après,
- La fin du RGO de Miniloute, au bout de 3 ans.
- Le RGO, jamais 2 sans 3 !
Le RGO, ça te vole des pans entiers de la vie avec ton bébé. Des heures à porter, à supporter les hurlements mais surtout à te sentir impuissant face à la souffrance de ton enfant. Le RGO, ça te fait penser et dire des choses que tu ne penses pas sous le coup de la fatigue et de l'énervement : à ton conjoint, à ton bébé, à tes autres enfants.
D'ailleurs, ça te vole aussi une partie de ta relation avec tes grands. Du moins c'est mon impression. Pour Miniloute comme Bébéloute j'ai la sensation de délaisser complètement mes aînées et évidemment je culpabilise. Je n'ai clairement pas le temps de passer du temps de qualité avec elles car toutes mes journées et mes nuits sont rythmées par les pleurs, la douleur de ma toute petite et ma propre fatigue. Bien sûr elles sont adorables et comprennent mais ça n'empêche pas que souvent elles me manquent terriblement alors qu'elles sont dans la pièce d'à côté.
Le RGO s'attaque aussi à ta santé mentale. On ne sait plus quoi faire à force de tout essayer pour soulager son enfant, à courir les médecins pour avoir une solution et on se heurte souvent à l'incompréhension. On se sent seul, seul face à l'entourage, au corps médical, à bébé qui souffre nuit et jour.
Un bébé rgo ne pleure pas, il hurle. Pendant des heures, dans tes bras, et c'est très difficile à vivre.
En crise, Bébéloute se jette en arrière, me repousse, me griffe. Les poings serrés, les yeux fermés, elle est prisonnière de sa douleur et je ne peux pas communiquer avec elle. Je peux juste la porter et marcher, inlassablement, et bien souvent pleurer avec elle. En crise, mon bébé refusera le sein, me lacérera d'ailleurs la peau à cet endroit et refusera de s'alimenter pendant plusieurs heures. Chez tous mes enfants, les crises les plus douloureuses et inconsolables ont lieu le soir et au début de la nuit, pendant une période déjà compliquée pour tous.
Le RGO me fait angoisser tous les soirs parce que je sais ce qui m'attend. Plusieurs mois durant.
Le RGO fait souffrir mon enfant, me vole ma vie, mais aussi mon allaitement. Car à force de refuser les tétées, j'ai vécu plusieurs engorgements. Parce que ma fatigue et mon épuisement moral a mis a mal ma volonté face aux difficultés des premières semaines de l'allaitement, ô combien cruciales pour la poursuite de celui-ci. Ma lactation a alors baissé malgré tous mes efforts pour la relancer : tirage de lait 6 à 8 fois par jour, homéopathie, phytothérapie, astuces diverses... Je vous en parlerai bientôt dans un article mais ça nous a conduit à introduire des biberons de préparation en poudre alors que je voulais un allaitement exclusif. Alors bien sûr il est possible et fréquent d'allaiter un bébé RGO, mais pour moi c'était devenu compliqué mentalement et physiquement. Je prenais très mal le fait qu'elle repousse mon sein et refuse de téter en plus de toutes les embuches déjà rencontrées.
Certains jours je voudrais claquer la porte, ne plus passer mes journées avec un bébé qui hurle. La plupart du temps je voudrais juste prendre sa douleur et souffrir à sa place. Comment supporter qu'un si petit bébé souffre autant ?
Je n'ose pas sortir ou recevoir chez moi parce que je sais qu'elle va pleurer et qu'il n'y aura rien à faire. Parce que je n'ai pas envie de répondre aux questions ou de répéter toujours la même chose : non elle n'a pas faim, oui j'ai essayé ceci ou cela, non le portage en écharpe n'aggrave pas son état, non il n'y a rien à faire pour sa voix cassée à force de hurler, non changer de lait n'y fera rien, non les médecins n'ont toujours pas trouvé la recette miracle pour apaiser les bébés RGO... Alors forcément on se sent encore plus seul et isolé, forcément les journées sont interminables et on redoute parfois de les passer avec son propre bébé, forcément on croit qu'on va devenir fou...
Pour l'avoir déjà vécu 2 fois (et ma deuxième à eu un RGO long et très intense), je peux dire que ce qui a souffert le plus (en dehors de mes pauvres bébés, évidemment), c'est mon dos, mon moral et mon optimisme. Je sais qu'il y a des jours avec et des jours sans, des jours où tu espères, où tu penses que c'est fini, et des rechutes. Que les dents, les vaccins, les rhumes, les otites, le moindre petit truc peut le faire revenir au galop alors qu'il était maitrisé.
Je sais aussi que ça passe. Dans la grande majorité des cas. Pour Liloute, on a respiré au bout de 4-5 mois, et le traitement a pu être stoppé avant la marche. Pour Miniloute, ça a été plus progressif car très intense et douloureux, rien ne fonctionnait vraiment à long terme. Mais même chez elle, semaine après semaine, il y avait du mieux. Alors je garde espoir, même si c'est dur, même si je doute de ma capacité à " survivre " à tout ça une troisième fois.
Reste tout de même que ce foutu RGO est une plaie. Un mal pas toujours pris en compte par la corps médical " tous les bébés régurgitent " " ça passera à la marche " ce qui rend le traitement encore plus compliqué. Surtout qu'on sait désormais que les causes peuvent être multiples... Pour certains parents c'est un vrai casse tête : chercher les allergies, le bon lait, le bon épaississement, le bon traitement, le bon spécialiste et tâtonner plusieurs mois et tenant sur les nerfs. Et pendant ce temps bébé souffre et ses parents aussi...
Je suis consciente que cet article est un peu amer, sans doute parce qu'il est écrit à chaud, pendant une période compliquée où on est " en plein dedans ". D'ici quelques semaines ou mois, j'aurai plus de recul. Mais pour le moment on galère. Et j'en ai marre de voir mon bébé hurler de douleur sans rien faire à part attendre...