Lorsque j'étais étudiante, mes premières "vacances" se soldèrent par des jobs d'été en juillet et en août, ce après quoi, si j'en avais encore le courage, les vendanges tendaient leurs ceps et moi, à défaut de bi-ceps, mes bras devenus fébriles. Point trop n'en faut, ce type de grille estivale finit par vous tuer. L'année d'après, pour profiter de la chaleur juillettiste, j'avais décidé de partir en goguette -c'est du moins ce que, naïve, j'imaginais alors- avec plein d'amis, pour cueillir les abricots dans la Drôme, à côté de Tain-l'Hermitage, là où se concentre l'essentiel de la production abricotière et fruitière française.
A peine arrivée, le programme ne me réjouit guère : lever aux aurores pour éviter la chaleur excessive -qui nous accablait malgré toutes ces précautions dès 9h00-, la douloureuse sacoche en bandoulière pour recueillir les 10 kilogrammes de fruits qu'elle pouvait contenir, perchée sur une échelle de laquelle on n'apercevait, bien franchement rien d'autre si ce n'est ... des abricots à perte de vue. A partir de deux journées tenues à ce rythme, se produit un phénomène paranormal que même Sigmund Freud n'aurait pas renié analyser : des nuits en colorama teintées uniquement de vert et d'orange. Cette bichromie obsédante relatait l'exacerbation nocturne des images diurnes mettant en scène l'abricot charnu dans son dense feuillage.
Un tel rapport de couleurs complémentaires me parle quand il s'agit d'arts plastiques. En outre, transpirer à grosses gouttes toute la sainte
journée ne m'a jamais sied, j'en prenais vraiment la pleine mesure. Seulement je découvris l'intérêt gustatif des abricots cueillis sur
l'arbre, juste à la pointe de la branche, là où le soleil darde très fort
et piquette les plus beaux fruits de taches rouges enflammées. Malgré cela, à cause d'un contexte harrassant, dès mon retour en terre comtoise, j'obéis sine die à un étrange commandement : ne plus jamais manger d'abricots. Je ne pouvais plus les voir en peinture, et leur souvenir papillaire ne serait jamais l'égal des exemplaires glanés lors de ce séjour de labeur.
Quelques poignées d'étés plus tard, alors que je reste ferme sur ma dégustation nirvânesque du haut de mon escabeau, de nombreuses apparitions dudit fruit réveillent toute ma curiosité à son égard. Dois-je le rôtir, l'agrémenter de lavande ou plutôt de chèvre frais ? Sans amandes l'abricot survivra-t-il ? Autant d'interrogations premières qui doivent trouver des embryons de réponses. Pour ce faire, je me suis résolue à acheter des abricots du Roussillon, en vue de les transformer avant de les consommer. Ce qui donne une délicieuse
Mijotée d'abricots à la pistache proportions données pour 2 personnes :
-8 beaux abricots (variété bergeron, de gros calibre)
-1 c.s. rase de sucre roux
-10 g de pistaches non salées
-10 g de beurre
Lavez les abricots, séparez-les en deux et dénoyautez-les.
Dans une cocotte (en fonte) faites fondre le beurre, ajoutez les oreillons d'abricot l'intérieur contre la casserole, saupoudrez de sucre, recouvrez et laisse mijoter 25 minutes à feu très doux.
Prélevez délicatement les abricots pour les disposer dans un compotier, égrenez la pistache, laissez reposer. Servir à température ambiante.
Note : si vous servez cette mijotée froide, réfrigérez le compotier avec les abricots cuits une fois qu'ils ont déjà tiédi pour éviter de réchauffer votre réfrigérateur. Et n'ajoutez la pistache qu'au moment de servir. Elle supporterait mal le passage au froid.