"On ne peut rien dire du silence - puisque lui seul a le pouvoir de dire, lui seul détient les cordons de l'être et de la parole, liant et déliant, connaissant et séparant.
Tout est déjà dit de ce que nul ne dira, l'heure immense aux ombres démesurées, sans rive ni bord, où la présence n'est de personne et l'incommensurable jaillit d'une mince rainure.Le silence tient l'arbre bien droit, taillé à l'aigu, non point par la chevelure grisonnante des racines mais par la pointe de la cime, par l'aimant de la lumière, et de la feuille ultime à l'azur c'est la même puissance vibratoire, on n'entend rien, on voit, on voit avec des oreilles qui plongent loin en dedans, les fines radicelles du réel, elles puisent au silence, jusqu'au sommet de l'univers où soufflent les vents roulants les astres, les traînes de nébuleuses, poussières de l'esprit clairsemé, radiances, et le silence, le silence éperdu, de toujours à toujours, épars entre les étoiles, sillage fossile à la queue des comètes."
Philippe Mac Leod, Variations sur le silence.p. 24