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Où passe le temps ?

Publié le 02 septembre 2020 par Elosya @elosyaviavia

Où passe le temps ?Hier soir en rentrant après le boulot, j’ai vu deux adolescentes en train de discuter sur le trottoir en face de mon immeuble.

Toutes les deux en jean avec un haut large de sweat-shirt. L’une avait mis la capuche de son survet sombre sur ses longs cheveux, elle tenait son téléphone et semblait chercher une info importante. L’autre, avec son haut de survet gris clair, lui parlait.

Elles étaient toutes les deux assises sur un skate.

Un instant, fugace hein, j’ai pensé : mais pourquoi rester dehors comme ça.

Ça fait plusieurs fois que je les vois à ce même spot depuis quelques semaines. Mon regard a déjà glissé sur elles, les apercevant sans les remarquer totalement. Il n’y a que ce soir où je leur ai prêté une attention plus vive.

A la suite de ma remarque, y a une partie de moi qui s’est marrée et qui m’a lancé intérieurement : comme si toi tu n’avais pas passé des heures durant sur le même banc, espace de jeux, trottoir plus jeune ?

Je me suis souvenue. De ce trottoir, endroit  favori de moi et mon amie F. Nous y passions des heures à bavarder.

Des heures vraiment.

Pas de portables à l’époque, enfin si après j’en ai eu un, mais les premières fois où l’on s’est assise, nous n’avions pas de portables. Il y avait juste le bruit des trains de banlieue qui passaient inlassablement à la gare pas très loin. On restait là après les cours. J’adorais passer du temps là. J’adorais avoir la sensation de pouvoir y rester des heures. Même s’il fallait bien rentrer à un moment.

Je savais que je devais rentrer quand je voyais le jour qui commençait à décliner. Aussi lorsque le bruit des trains s’espaçait, le nombre de personnes rentrant chez eux diminuait drastiquement. Les maisons s’animaient, s’allumaient. Un autre signal c’était lorsque nous voyions sa mère, qui sortait devant le portail de la maison, lui faisant de grands signes (nous étions suffisamment loin pour ne pas être entendues, mais suffisamment près de chez elle pour qu’elle soit encore visible) finissant à un moment par hurler que ça suffisait maintenant, qu’il fallait rentrer pour manger.

C’est quand même fou, tous les ans j’ai cette nostalgie de rentrée qui finit toujours par se pointer.

Voir les enfants de mes ami.e.s faire leur rentrée aussi, ça me fait un truc. Ils grandissent tellement vite. Utilisons l’image d’un magnetoscope, au début  j’entrevois encore ce petit bambin qui commençait à peine à parler et bim avance rapide, il est déjà en CP avec un cahier de liaison.

(Eh oui je viens d’employer le mot magnétoscope, un appareil qui a fait toute l’education télévisuelle et cinématographique de certains d’entre nous dans les années 80-90.)

Puis je me suis dit que cette année, moi aussi j’allais sentir un grand bim arrivé, parce que hey, putain de bordel de comment, quoi, je vais avoir 40 ans.

Oui 40 ans.

Où est passé ce temps. Depuis le confinement et les derniers mois, que nous avons passé je m’interroge beaucoup là dessus. Sur la temporalité, sur ce que je fais de mon temps, sur l’avenir, sur ce passé qui n’est plus aussi omniprésent, mais qui s’incorpore maintenant tranquillement à ce qui se passe dans ma vie de maintenant. J’hallucine aussi, je me dis : tu te souviens y a plus de 6 mois, personne ne s’extasiaient devant la beauté de ton masque fait main. Ou ah oui, mais c’est quand même dingue comment la phrase : ah merde mon masque, a pu se glisser, comme ça tranquilou bilou dans ton quotidien.  Je me dis que c’est fou, ce changement de pratiques, de comportement dans un si petit laps de temps en fait. Je crois que j’ai rarement eu autant d’acuité sur mon rapport au temps qu’en cette période de confinement faite de flou, d’interrogations, de longues plages de pensées et d’arrêt sur image, sur soi.

D’où vient ce rapport au temps ? Vous avez remarqué comment lorsque l’on s’ennuie en réunion le temps ralenti de manière abyssale. Mais une bonne soirée entre potes, à peine un clignement d’oeil et c’est déjà fini.

J’avais vu une infographie qui expliquait le rapport au temps/âge. Pour résumer, ça disait qu’avant la vingtaine le temps paraît très lent, étirable à l’infini, ensuite le temps devient rapide dans sa perception.

Que faire de cette information, me direz-vous ?

Eh bien, la prendre pour ce que c’est. Le résultat d’une étude scientifique qui ne doit pas nous empêcher de nous souvenir que même si le temps file doucement entre nos doigts, on est toujours à même de savoir ce que l’on veut faire de lui.

éèé

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