Quand on perd une jambe à la guerre
On en met une autre en bois
Car il paraît qu’on a beau faire
Les jambes ne repoussent pas.
Mais peut-on me dire pourquoi
Il ne pousse pas de feuilles sur les jambes de bois ?
Des feuilles toute vertes
Avec des tas d’insectes,
Des feuilles toute belles
Où les papillons viendraient réparer leurs ailes…
Le soleil voudrait se mettre de la partie
Il pourrait y grimper des fruits,
Et ça serait tout de même chic
D’avoir sur soi des poires
Qu’on prendrait sans histoires
Des pommes et des prunes et des petits pois chiches !
Si tous les hommes avaient une jambe de bois
Qu’on arroserait bien les jours qu’il ne pleut pas
Ça f’rait une forêt qui n’en finirait pas.
© René de Obaldia de l’Académie française
Extrait des Innocentines paru chez Hachette ; chez Grasset (collection les Cahiers Rouges)