La somptueuse Plaza San Martín de Lima
(photo aérienne du Ministère de la Défense du Pérou)
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Au printemps 1798, à Toulon, un jeune lieutenant d’infanterie de marine, José de San Martín, à tout juste vingt ans, avait vu partir le général Bonaparte, de neuf ans son aîné, à la tête d’une énorme flotte qui avait aussitôt fait voile vers l’est. La destination de cette expédition restait secrète mais il ne pouvait s’agir que d’une gigantesque opération contre les Britanniques.
Portrait de Joaquím Pezuela, le dernier vice-roi du Pérou
nommé par les autorités espagnoles
Il a dû son élévation à cette charge
à ses victoires remportées contre Manuel Belgrano
en 1813 dans le Haut-Pérou (actuelle Bolivie).
Illustration tirée de la Revista del Instituto Sanmartiniano del Perú
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Le 20 août 1820, à Valparaíso au Chili, après plus de deux ans de préparation ardue, San Martín prenait à son tour, contre un autre empire, la tête d’une autre flotte beaucoup plus modeste, puisqu’elle ne se composait que d’une quinzaine de bâtiments difficilement rassemblés. Depuis 1814, San Martín ne poursuivait qu’un seul objectif : faire tomber le dernier bastion de l’empire colonial espagnol en Amérique du Sud afin d’abolir la dernière vice-royauté encore en place et instituer à sa place un État péruvien souverain avec Lima pour capitale. San Martín avait quarante-deux ans, comme son ami, le directeur suprême du Chili, Bernardo O’Higgins, dont c’était ce jour-là l’anniversaire de naissance et qui vint saluer l’expédition à son départ.
Article à la première page de la Gazette de Lausanne
parue le 13 août 1819, un an avant le départ de l'expédition
Les opérations navales étaient confiées à un ancien officier supérieur de la Royal Navy, un homme jeune, de belle prestance, ambitieux et ombrageux, qui allait s’avérer d’une indiscipline insupportable et d’une honnêteté plus que discutable. Il s’appelait Thomas Cochrane et il était l’héritier du comté écossais de Dundonald, qui, à la mort de son père, avec qui il était fâché, lui permettrait de siéger à la Chambre des Lords. Jusqu’à son départ pour le Chili, en 1818, l’expérience politique de Lord Cochrane, comme il se faisait appeler, se limitait à un mandat de député aux Communes où son caractère paranoïaque lui avait mis à dos tous les élus du Royaume-Uni. Pour une sale histoire de fraude boursière, après avoir été chassé de la Marine pour son insubordination systématique, il avait même goûté pendant un an à l’hospitalité des prisons de Sa Majesté. Depuis son arrivée au Chili en décembre 1818, il donnait déjà du fil à retordre à San Martín, qu’il refusait obstinément de reconnaître comme général-en-chef de l’expédition.
Couverture du catalogue d'une exposition de 2012
organisée par les Archives nationales péruviennes
(Archivo General de la Nación)
Sous le blason de la République,
le manuscrit d'une lettre d'affranchissement d'une esclave
signée par San Martín
En longeant la côte chilienne et le désert d’Atacama, l’expédition navale mit trois semaines à atteindre sa destination. En envoyant en tous sens ses lieutenants multiplier les engagements sur toute l’étendue du littoral pour épuiser les troupes du vice-roi et les démoraliser, San Martín mit un an à convaincre les Limègnes de déclarer leur capitale ville ouverte et d’abandonner le régime colonial pour prendre eux-mêmes en main leur destin national.
Composition de l'armée de libération du Pérou
établie par le général argentin Geronimo Espejo
dans un ouvrage publié à Santiago du Chili en 1868
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Le général San Martín est donc le père-fondateur de l’actuelle République du Pérou qui s’engage actuellement dans les préparatifs de son Bicentenaire. Il reste à espérer que les célébrations ne souffriront pas trop des malheurs du temps (1).
Composition de la flotte de l'Expédition
tirée du même ouvrage
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Tous les samedis à 21h, la télévision publique du Pérou propose l’émission Modo Bicentenario pour présenter les projets de tous ordres et les acteurs des futures festivités. De nombreuses émissions de TV Perú sont disponibles sur YouTube.
(1) Le Pérou est l’un des pays qui souffrent le plus de la pandémie. On déplore beaucoup de morts, y compris parmi les médecins (déjà plus de 125 victimes dans cette catégorie). Quant au système sanitaire, il est dépassé par l’ampleur du phénomène et manque de tout. Ce dont profitent des aigrefins, comme le prouve la découverte hier d’un réseau de trafic de masques, blouses, gants, visières, etc. de mauvaise qualité et surfacturés à la police nationale qui tâche de protéger tant bien que mal ses fonctionnaires.