On ne peut pas encore visiter l'intérieur de la demeure de l'écrivain à laquelle on accède au bout d'une petite route piétonne en lacets, qui démarre au 87 rue de Chateaubriand, mais on peut suivre, en extérieur, une conférence expliquant les divers aménagements architecturaux des propriétaires successifs. L'empreinte de François-René de Chateaubriand y est nette mais ce n'est pas la plus décisive puisqu'il n'y aura vécu que dix ans. Je reviendrai ultérieurement sur les transformations des façades et sur la construction de ce qui est aujourd'hui un salon de thé, très fréquenté dès qu'il fait beau.
Il est en effet accessible pour y prendre un rafraîchissement, y goûter (toutes les pâtisseries sont maison) et même y déjeuner. Il est prudent de réserver parce qu'un tel endroit, en plein air évidemment et dans un tel cadre est forcément très convoité. Il s'appelle Les Thés Brillants, et est ouvert du mercredi au dimanche de 11 h à 18 h 30 (sauf de novembre à février fermeture 16 h 30, fermeture totale en janvier).
Chateaubriand était un écrivain paysagiste qui convoitait une retraite en pleine nature, loin de Paris, après la publication du pamphlet contre le despotisme de l’empereur qu’il compare à Néron. S'il se met à l'écart de la vie publique il n’est pas en exil comme le fut Victor Hugo. Les bois lui rappellent ceux de Combourg. Il est persuadé qu'il pourra assouvir dans le domaine ses grands besoins de méditation. Son objectif est de faire défiler son passé en regardant les arbres. Le parc sera un ensemble composé d’un jardin romantique, d’une prairie et de sous-bois dont la tour Velleda a pris le nom d’un de ses personnages.
Mais avant arriver au résultat que nous avons sous les yeux
il a entrepris de gros aménagements, et dont il ne profita pas réellement puisqu'il ne vécut ici qu'une dizaine d'années n'ayant pas le temps de profiter des perspectives qu'il a créées. Il a arasé une colline de taillis de châtaigniers et de pommiers devant la maison dont il fit la description dans les Mémoires d’Outre-tombe. Il dessinera, tracera des allées, modèlera l'espace comme l'aurait fait un paysagiste. Il choisit ses arbres pour leurs qualités ornementales et pour le lien qu'il fait avec les contrées visitées, de manière à ce qu'ils soient comme des souvenirs vivants de l'Amérique et de l'Orient.Lui qui n'a pas eu d'enfants, entretient à leur égard, une relation proche du sentiment paternel. Il disait d'eux "c'est ma famille" et les a soignés de ses mains, allant jusqu'à leur faire de l'ombre avec son propre corps. Le voyage en Orient (juillet 1806-juin 1807) suscite donc l'idée de cette allée, dite Méditerranée avec les platanes qui rappellent la Grèce et les hêtres l'Italie. Elle commence avec le Maronnier d'Inde, qui contrairement à son appellation, est en fait originaire des montagnes du nord de la Grèce et d'Albanie.
En principe l'espèce ne dépasse pas 20 mètres de haut. Pourtant celui-ci est déjà haut de 30 mètres. Il a le tronc droit mais noueux, ce qui est spectaculaire et peu courant. C'est un arbre rustique à la pollution urbaine. Et pourtant il souffre, comme tous ses congénères, d'un parasite, la mineuse du marronnier.
Un peu plus loin, deux Cèdres du Liban, dont un plus jeune car après les dégâts de la terrible tempête de 1999, il y eut une opération de reboisement avec notamment la plantation de nouveaux cèdres du Liban. Chateaubriand avait souhaité cet arbre car il avait longé les côtes libanaises en bateau avant d'arriver à Jaffa. Il faut savoir qu'il n'a pas ramené de plants. Il se fournissait chez des pépiniéristes de renom comme celui de Montrouge ou un autre, qui s'appelait Noisette (c'était son nom réel).
Introduit en France en 1734, par un botaniste, Jussieu, qui le ramène dans son chapeau après avoir brisé malencontreusement le pot, ce conifère à feuillage persistant est originaire du Liban, de Syrie, et du Sud-Est de la Turquie. Ce premier cèdre français est toujours à Paris, au jardin des Plantes. Il peut être millénaire, d'où son côté sacré. Il est l'emblème national du Liban.
Nombre de poètes ont été fascinés par cet arbre, comme Lamartine qui le célèbre en 1835 dans son ouvrage Voyage en Orient. Il s'inquiétait déjà à cette époque de signes d'une déforestation, ce qui en fait un pionnier de l'écologie. C'est un arbre qui aime les sols pauvres de montagne. Il a perdu ses branches basses car le sol ici est trop riche. Son port est conique quand il est jeune, tabuleux à maturité et on le constate en les regardant côte à côte.
Les cèdres sont des grands arbres au feuillage persistant, comme la majorité des résineux, donc toujours dense. Leur port est très caractéristique. Les branches s’étalent en longueur et se développent en une large cime conique. Dans des conditions favorables les cèdres peuvent atteindre 100 mètres de hauteur. Avec l’âge, les cèdres et en particulier le cèdre du Liban, prennent un port en forme de table. Il fleurit en septembre. Les fleurs mâles et femelles sont portées par des rameaux distincts. Les aiguilles sont regroupées en rosettes denses sur les courts rameaux qui garnissent les branches.
Son bois est exploité depuis l'Antiquité car il est imputrescible. Il est employé dans des monuments sacrés, comme les charpentes du premier temple de Jerusalem. Il repousse les mites. Les égyptiens l'utilisaient pour les sarcophages et embaumaient les momies à l'huile de cèdre.
Quand il devra quitter la Vallée-aux-Loups pour s'installer dans une maison mitoyenne de la maison Marie-Thérèse où oeuvre sa femme Céleste (qui vendait des chocolats au profit de son oeuvre de charité), Chateaubriand plantera un autre cèdre en 1823 dans le jardin ... qui est aujourd'hui celui de la fondation Cartier, créée par Jean Nouvel.
Aclocque de Saint-André, le premier propriétaire du domaine avait fait construire en 1792 dans le parc le premier niveau d'une fabrique que Chateaubriand fit surélever et lui donna le nom de "Velleda" en hommage à l'héroïne de son roman, Les Martyrs, publié en 1809. Il y installa son bureau et sa bibliothèque. Il n'est pas rare de voir des écureuils grimper aux arbres voisins.
C'est une espèce d'arbres de la famille des Taxodiaceae, cousine des genévriers et originaire du sud-est des États-Unis. C'est une espèce très résistante au froid et remarquable par son adaptation aux milieux humides. Très résistant au vent, bon fixateur de berge, il peut vivre 1000 ans dans son aire naturelle et supporte la submersion grâce à ses pneumatophores, racines aériennes servant de réserve d’oxygène, pour les racines installées dans les sols inondés et qui peuvent atteindre 1,70 m de haut. Il faut se souvenir qu'à l'époque de sa plantation le ru d'Aulnaie traversait le parc mais depuis son détournement on n'observe plus de pneumatophores.
Pour en voir il faut se rendre plus bas, dans l'arboretum voisin où sur quelques mètres on pourrait s'imaginer dans un bayou de la Nouvelle-Orléans tant ses racines surgissantes sont étonnantes. On les surnomme genoux de sorcière.
J'ai vu un autre exemplaire exceptionnel de cyprès, puisqu'il fait 42 mètres de circonférence. El Árbol del Tule (l'arbre de Tule en espagnol) est situé devant l'église de Santa María del Tule dans l'État mexicain d'Oaxaca, à environ 13 km de la ville d'Oaxaca de Juárez sur la route de Mitla. Son âge précis est inconnu. Les estimations vont de 1200 à 3000 ans.
Le Ginkgo biloba, arbre aux
quarante écus, est originaire quant à lui du sud-est de la Chine. Il a été introduit en France en 1778. C'est un arbre à feuillage caduc. Cette bouture racine de l'arbre planté par Goethe en 1815 au centre de Weimar a été offerte à la Maison de Chateaubriand par la Fondation Weimarer-Klassik au mois de mars 2000 (cf accord de jumelage depuis 1999 entre la maison de Goethe et celle de Chateaubriand).La feuille de cet arbre, qui, de l'Orient, est confié à mon jardin, offre un sens caché, qui charme l'amitié.Est-ce un être vivant qui s'est scindé en lui-même ?Sont-ils deux qui se choisissent, si bien qu'on les prend pour un seul ?Pour répondre à ces questions, je crois avoir la vraie manière : ne sens-tu pas, à mes chants, que je suis à la fois un et double ?Poème de Goethe, 15 septembre 1815, publié en 1819 dans le Divan occidental-oriental.
En remontant on s'étonnera de voir un Catalpa qui s'est développé en branches aériennes à l'horizontale après avoir marcotté suite à une tempête. Si l'on froisse ses feuilles elles dégagent une odeur pestilentielle. Ses fruits pendent en longs haricots ... ce qui se dit catalpa en langue chiroqui.
En 1914 Le docteur Le Savoureux, psychiatre, deviendra acquéreur et lui redonnera une vocation littéraire. Il le cédera en viager à la Fondation Rothschild. Le Département de la Seine le rachètera en 1967. La maison rouvrira vingt ans plus tard après rénovation. Ceci est une autre histoire que je vous raconterai dans quelques jours.
Cet arbre est en réalité le seul de sa variété, car les graines qu'il donne produisent des cèdres ordinaires non pleureurs. Tous les autres Cèdres bleus pleureurs de l'Atlas sont des boutures ou des greffes réalisées à partir de cet exemplaire unique.
Personnellement j'aime beaucoup les pommes de ces cèdres dont la vue me fait systématiquement penser à Noël et à une assiette de petits gâteaux ... ou à des bougies sur des coupelles argentées.
Il est accessible, comme le parc du Domaine par une route qui part du 87 rue de Chateaubriand
92290 Chatenay-Malabry - 01 46 15 21 49
Les diverses animations estivales sont consultables ici.