Il était là, mot pour mot,
Le poème qui a pris la place d’une montagne.
Lui, respirait son oxygène,
Même quand le livre gisait à l’envers dans la poussière de sa table.
Il lui rappelait comment il avait eu besoin
D’un lieu à atteindre en suivant sa propre direction,
Comment il avait recomposé les pins,
Déplacé les rochers et frayé son chemin parmi les nuages,
À la recherche de la juste perspective,
Où il serait complet dans une complétude inexpliquée :
Le rocher exact d’où ses inexactitudes
Découvriraient enfin la vue vers laquelle elles avaient avancé,
Où il pourrait s’allonger et, contemplant la mer en bas,
Reconnaître son unique et solitaire foyer.
*
The Poem that Took the Place of a Mountain
There it was, word for word,
The poem that took the place of a mountain.
He breathed its oxygen,
Even when the book lay turned in the dust of his table.
It reminded him how he had needed
A place to go to in his own direction,
How he had recomposed the pines,
Shifted the rocks and picked his way among clouds,
For the outlook that would be right,
Where he would be complete in an unexplained completion:
The exact rock where his inexactnesses
Would discover, at last, the view toward which they had edged,
Where he could lie and, gazing down at the sea,
Recognize his unique and solitary home.
***
Wallace Stevens (1879-1955) – The Collected Poems (Alfred A. Knopf, 1954) – À l’instant de quitter la pièce : Le Rocher et derniers poèmes, Adagia (José Corti, 2006) – Traduit de l’anglais (États-Unis) par Claire Malroux.