Partager la publication "[Critique] GREENLAND – LE DERNIER REFUGE"
Titre original : Greenland
Note:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Ric Roman Waugh
Distribution : Gerard Butler, Morena Baccarin, Scott Glenn, Roger Dale Floyd, David Denman, Andrew Bachelor…
Genre : Catastrophe/Drame
Durée : 1h59
Date de sortie : 5 août 2020
Le Pitch :
Une gigantesque comète s’apprête à percuter de plein fouet la Terre. À la veille de ce qui s’annonce comme la nouvelle extinction de masse, John Garrity va faire tout ce qu’il peut pour conduire sa femme et son fils à l’abri, dans un bunker au Groenland…
La Critique de Greenland – Le Dernier refuge :
Traditionnellement, l’été est la saison des blockbusters américains. Le moment où les gros studios proposent aux spectateurs des productions d’envergure. Pas cette année. L’épidémie mondiale de Covid-19 ayant cruellement bouleversé un ordre établi et encouragé ces mêmes studios à repousser voire annuler leurs sorties les plus attendues. Des films comme Tenet, pour le moment prévu fin août, ou Mulan, que Disney a finalement programmé sur Disney + début septembre (en demandant à ses abonnés un gros supplément pour pouvoir le regarder). D’autres en revanche, ont fait le choix de tout de même tenter le coup. Oh bien sûr, pas les géants, mais des distributeurs conscients qu’il y avait peut-être une carte à jouer dans ce contexte inédit, en plaçant leurs pions stratégiquement pour pouvoir espérer rentrer dans leurs fonds. C’est ainsi que Greenland, un film catastrophe au budget assez modeste (50 millions de dollars) s’est imposé comme l’un des événements de l’été 2020. L’histoire d’une famille qui tente de survivre face à une apocalypse inéluctable, portée par un Gerard Butler qui, s’il n’entend pas cette fois-ci sauver le monde, tente en tout cas de venir à la rescousse du box-office…
Armageddon Now
Une comète a fait son apparition dans le ciel. Venue d’un autre système solaire, elle ne menace pas la Terre mais devrait passer assez près de notre atmosphère pour proposer un spectacle digne de ce nom à tous les astronomes en herbe. Sauf qu’en fait, assez imprévisible au final, la comète en question va bel et bien percuter la planète bleue et provoquer un cataclysme comparable à celui qui a mis fin au règne des dinosaures… Le genre d’histoire que le cinéma américain nous a raconté des dizaines de fois, tablant bien souvent sur un déluge d’effets-spéciaux pour masquer les faiblesses de scénarios prévisibles et peu nuancés. Avec son budget, le réalisateur Ric Roman Waugh (qui retrouve Gerard Butler après La Chute du Président), ne pouvait pas espérer rivaliser avec des blockbusters comme Armageddon ou Deep Impact. Ce qui, ironiquement, est une chance. Car quand on ne possède pas les fonds nécessaires pour orchestrer des scènes de destruction massives et autres orgies numériques censées illustrer un chaos XXL, on est bien obligé de faire confiance à son histoire et de se concentrer sur ses personnages. Une chance que le scénario de Greenland, signé par Chris Sparling, à qui on doit Buried (avec Ryan Reynolds), soit justement assez solide pour offrir la chance à Ric Roman Waugh de nous gratifier davantage d’un drame familial puissant que d’un véritable film catastrophe avec tout ce que cela sous-entend…
Impact imminent
C’est ainsi que Greenland se focalise en permanence sur ce père et cette mère engagés dans une lutte pour la survie de leur famille. Le réalisateur collant de près aux personnages incarnés par Gerard Butler, Morena Baccarin et le jeune Roger Dale Floyd, proposant un spectacle certes moins tapageur que ce à quoi on aurait pu s’attendre sur un plan purement visuel, mais bien plus immersif et prenant que prévu. Ce qui est bien sûr préférable. Un peu à la manière de l’excellent et viscéral No Escape, dans lequel Owen Wilson et les siens tentaient de quitter un pays d’Asie en plein coup d’état, Greenland nous place aux côtés de cette famille en péril et se montre non seulement passionnant dès les premières minutes mais aussi parfaitement sincère dans ses intentions. On ne tarde ainsi pas à trembler pour Jack, Allison et Nathan Cassidy, alors qu’ils tentent par tous les moyens de rallier ces bunkers au Groenland, sans même être sûr que ces installations pourront les protéger de la fin du monde. Remarquablement écrit, se refusant à tout sensationnalisme facile et tout raccourcis opportunistes, Greenland ne cherche pas la punchline (il n’y en a qu’une seule véritable et elle est excellente), préférant jouer la carte du réalisme. Son apocalypse gardant une dimension profondément humaine, du début à la fin.
Gerard vs. La comète
Déjà embauché pour sauver tout un tas de trucs, de Sparte au Président, en passant par la planète toute entière, comme dans le récent et boiteux Geostorm, Gerard Butler lui aussi profite des intentions nobles de Greenland et de son écriture sensible et nuancée. Parvenant très rapidement à incarner un personnage plein de fêlures, bien loin du héros providentiel, Butler se montre plus qu’à la hauteur et même carrément surprenant. À tel point qu’il n’est pas inconcevable de se demander si Greenland ne lui a pas offert son meilleur rôle. Oui carrément. Parfaitement servi, l’acteur fait de plus équipe avec une Morena Baccarin impeccable en mère courage, elle aussi parfaitement compétente quand il s’agit d’illustrer la détresse et la détermination de son personnage. De toute façon c’est bien simple, rien ne sonne vraiment faux dans Greenland. Ni le jeu des acteurs, ni la façon dont le récit progresse, ni même le rendu visuel. Certes les effets-spéciaux sont parfois un peu « voyants », trahissant un budget limité, mais force est de saluer la façon dont Ric Roman Waugh est parvenu à contourner ce genre de difficultés pour tout de même honorer son cahier des charges. Le cinéaste nous offrant même une séquence pour le coup très spectaculaire, quand la famille, bloquée sur l’autoroute, doit faire face à une pluie de comètes. Le fait que jusqu’ici, le film se soit efforcé de nous rendre les protagonistes attachants amplifiant notre capacité à justement aller au-delà de la simple envie de voir des astéroïdes pulvériser des villes, cette séquence, haletante au possible, sévère ainsi plus spectaculaire que n’importe laquelle du Armageddon de Michael Bay.
N’évoluant jamais au ras des pâquerettes, comme peuvent le faire les films du genre, les gros budgets qui tiennent plus de la montagne russe que du long-métrage, puissant, se refusant à tout cynisme et même émouvant, Greenland, s’il enchaîne certains clichés inhérents au style auquel il se rattache, le fait tout le temps avec une sincérité qui fait toute la différence, se plaçant exactement au croisement de productions intimistes comme These Final Hours, de Zak Hilditch et Deep Impact, de Mimi Leder. Tout de même plus spectaculaire que le premier mais possédant la même intensité dramatique, mais aussi beaucoup moins bas du front que le second.
En Bref…
Et si Greenland était l’un des meilleurs films catastrophe de ces trente dernières années ? C’est bien possible. Honnête, vibrant, émouvant même, porté par des acteurs formidables, Gerard Butler et Morena Baccarin en tête, Greenland est une excellente surprise. Un spectacle certes moins tapageur que prévu mais beaucoup plus incarné et passionnant, tenant davantage du drame que du pur film de fin du monde misant tout sur ses effets-spéciaux. On y gagne forcément au change.
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Metropolitan FilmExport