Avec la naissance de Square, il y a plus d'une décennie, les petits commerçants, les vendeurs occasionnels, les artisans itinérants…, qui ne disposaient jusqu'alors d'aucune solution pratique et économique, ont pu commencer à accepter les règlements par carte directement sur leur téléphone, moyennant un lecteur connecté à ce dernier. Avec la popularité croissante du paiement sans contact et la présence quasi universelle d'une interface NFC sur les appareils modernes, une application peut maintenant suffire.
Pour l'instant, l'iPhone est resté à l'écart de cette (r)évolution, Apple se réservant jalousement l'accès aux fonctions les plus critiques du module sans contact qu'il embarque depuis sa série 7, interdisant de la sorte à un acteur tiers de l'exploiter dans le but d'implémenter une fonction de paiement. Le rachat de la startup québécoise Mobeewave, qui a conclu l'année dernière un partenariat mondial avec Samsung pour la distribution de son service de « mPoS », devrait rapidement combler cette lacune.
Selon la ligne habituelle de sa politique d'investissements stratégiques, la marque à la pomme devrait en effet, grâce à la technologie et à l'expertise de la jeune pousse, élaborer et commercialiser sa propre plate-forme d'encaissement logicielle. Elle fournirait ainsi aux professionnels un moyen particulièrement attractif d'accepter les paiements par carte sur leur iPhone ou iPad existant, sans souffrir les complications techniques et contractuelles des produits équivalents proposés par les banques.
Bien sûr, le concept laisse toujours en suspens quelques questions opérationnelles. Outre la restriction intrinsèque aux transactions sans contact (que les consommateurs ont généralement le choix de désactiver), les protections spécifiques mises en œuvre, dont notamment l'exigence d'authentification régulière après un volume donné de paiements sans contact, risquent de constituer un obstacle au terminal virtuel. Mais tel est le pouvoir d'Apple qu'il est possible qu'elle trouve une réponse optimale à ces frictions.
Un danger auquel le constructeur n'échappera certainement pas, en revanche, sera l'accusation de pratiques anti-concurrentielles. Déjà sous le coup de plusieurs enquêtes à travers le monde, dont celle qu'a récemment lancée la Commission Européenne, pour la position monopolistique d'Apple Pay, les arguments de sécurité invoqués afin de justifier son exclusivité d'utilisation des interfaces NFC deviendront de plus en plus difficiles à maintenir avec cette nouvelle manifestation d'hégémonie.
Quelles que soient les réactions réglementaires, il ne fait pas de doute que, si l'initiative se concrétise et si la « magie » qu'elle sait déployer en matière d'expérience utilisateur continue à opérer, l'entrée d'Apple dans la danse de l'encaissement mobile a de grandes chances, encore une fois, de transformer le marché. En démocratisant la technologie sans contact, elle peut même envisager de clore définitivement le débat du paiement par QR-code… dont les avantages ne suffisent pas à en faire une solution parfaite.