Vous connaissez mon intérêt pour le zéro déchets et les moyens d’y arriver… Pour cette raison, je me suis intéressée à ce livre lors du dernier Masse critique de Babélio. Pour autant, je m’attendais sans doute à autre chose, et non à une réflexion plus philosophique que écologique sur les emballages. Philippe Garnier, tel Philippe Delerm en son temps avec la première gorgée de bière, revient en effet en une série de petits textes sur tous ces emballages qui sont passés (et passent encore dans notre vie), tels de multiples madeleines de Proust en plastique, aluminium ou carton. Il démontre également combien le design prend sens dans leur conception et cherche un chemin vers notre imaginaire pour mieux nous rendre captifs. Malgré tout, et même si ce livre ne cherche pas à convaincre ni à donner de leçons, on sent bien que l’auteur pointe du doigt l’accumulation, la gestion des déchets, la place que le plastique a fini par prendre dans notre vie. Son apparition a rendu notre quotidien visuellement propre et lisse, uniforme, sans mauvaise surprise, rassurant. Et en cela ce texte est profondément intéressant, car il nous permet de prendre du recul sur toute cette histoire d’emballage, ce concept relativement récent et qui a en général une durée de vie très courte dans notre maison, mais une durée de vie sur la terre hallucinante. En conclusion, et même si j’ai été un peu déçue par la forme de ce livre, il me paraît important de s’y intéresser. Se pencher sur notre rapport profond avec les emballages me semble effectivement un premier pas nécessaire vers une autre façon de produire et de consommer. Et tandis que je rédige ce post, que je farfouille dans les pages de ce livre pour vous donner quelques extraits, je me surprends à avoir envie de le relire avec un regard neuf, et à le relire surtout en le mettant en perspective avec ce qui se passe aujourd’hui, où le fait de consommer un temps seulement l’essentiel a mis notre économie en péril.
« Jeter n’est pas à la portée de n’importe qui. C’est un programme ambitieux qui se déroule en plusieurs étapes. Il faut d’abord trouver à l’objet certaines qualités. Il faut ensuite le garder auprès de soi pendant un certain temps ou en consommer une partie. Il faut enfin nier sa valeur et le faire disparaître. Cela demande un certain apprentissage, une certaine maturité. Il faut pouvoir revenir sur un choix premier pour le déclarer inepte, une heure ou dix ans plus tard, accorder une valeur à la chose et la lui retirer. Un va-et-vient aussi fluide, aussi capricieux, est le fruit d’une longue éducation. La plupart du temps, nous jetons d’abord les emballages. »
« L’hyperconsommation nous apporte-t-elle de grandes satisfactions ? Rien n’est moins sûr. En revanche, elle nous apparaît, dans son accélération perpétuelle comme un processus ordinaire. La communication marchande est parvenue à présenter comme normal un mode de vie des plus étranges. Ce fut une de ses grandes prouesses. Toute perspective de ralentissement devient inquiétante. Toute tentative pour pérenniser les objets ménagers, bricoler un réfrigérateur et même fabriquer des réfrigérateurs potentiellement bricolables, fait figure d’hérésie. Le sens de la norme est un gisement qui s’est constitué au fil du temps. »
Editions Premier Parallèle – février 2020
J’ai aimé ce livre, un peu, beaucoup…