Avant on connaissait le bleu de Prusse ( c’était avant Merkel), le bleu marine ( c’était avant la chanson d’Adjani-Gainsbourg : j'ai touché le fond de la piscine Dans le petit pull marine ), le bleu azur ( c’était avant la vague de beau temps qui sévit actuellement sur toute la France, je dis bien TOUTE, même sur le petit coin là-bas en haut à l’Ouest où il fait toujours, disons, « frais » quand il fait chaud ailleurs), le bleu nuit ( douce nuit, nuit câline … sauf quand la nuit prend les reflets rougeoyants des incendies qui détruisent pinèdes et garrigues au-dessus de Martigues ) , le bleu roi ( c’était avant que Jean-Charles ne s’enfuit d’Espagne ; Au grand désespoir des lecteurs de Point de vue et tout simplement, de tous les amoureux de l’Espagne, même en Catalogne…Car quand même, Juan Carlos quel naufrage, quel gâchis, lui qui avait joué un rôle décisif pour assurer le retour de la démocratie après 40 ans de dictature franquiste, n’est-ce pas Tejero, toi qui le 23-F, le 23 février 1981, avait surgi pistolet au poing pour prendre en otage les députés espagnols en plein Cortès. Juan Carlos : de quoi en être vert de rage).
Et puis il y aussi le bleu Klein, du nom d’un peintre, qui peignait tout en bleu outre-mer et cela pouvait être très beau, comme cette statue vue sur la table du salon de Françoise Giroud, oui , je sais ça fait le type qui se la pète, qui a rencontré des célébrités, et pas de pacotille car Giroud, avec par exemple, Simone Veil et Gisèle Halimi, faisait partie de ces grandes dames qui ont fait avancer pas seulement la cause des femmes, et pour Giroud des femmes journalistes, mais nos sociétés tout simplement.
Revenons à nos moutons, en l’occurrence à cette statue qui trônait sur la table du salon de Françoise Giroud, - la Victoire de Samothrace ?- en tout cas une sorte de statue grecque ailée peinte en bleu outre-mer, bleu de cette Méditerranée qu’aimait Yves Klein le niçois – ( sauf quand cette mer se teinte de rouge du sang des migrants et réfugiés qui se noient anonymement au large de nos côtes, de noir, noir fumée, quand explose le port de Beyrouth, pauvre Liban, sur lequel s’abat toutes les plaies du monde, corruption, conflits confessionnels et coronavirus en tête).
Eh ! bien aujourd’hui il y a le bleu masque, masque chirurgical, masque obligatoire. Il empêche de voir les sourires. Ne permet plus les grimaces. Empêche les gosses de tirer la langue. Imaginerait-on Einstein tirer la langue derrière un masque ? Tout est très relatif, car le grand savant aurait très certainement trouvé un moyen de tirer la langue, lui qui expliqua à propos de la célèbre photo réalisée pour son 72 ème anniversaire : « Vous aimerez ce geste, parce qu’il est destiné à toute l’humanité. Un civil peut se permettre de faire ce qu’aucun diplomate n’oserait. » Et encore : « J’ai toujours eu de la difficulté à accepter l’autorité, et ici, tirer la langue à un photographe qui s’attend sûrement à une pose plus solennelle, cela signifie que l’on refuse de se prêter au jeu de la représentation, que l’on se refuse à livrer une image de soi conforme aux règles du genre ».
Dans les magasins, à la Banque, à la Mairie, dans le métro à Paris autour de moi, ce ne sont que visages bleus.
Notre avenir va-t-il donc s’écrire en bleu masque ?