Pour une fois, ce n'est une street artiste que j'ai interviewée. En effet, Florina ne peint jamais en vandale. Pour elle, cela revient à imposer son image au public sans son accord. C'est pourquoi elle peint uniquement pour des expositions ou sur commande chez des particuliers.
Un long chemin vers l'art
Florina Aledo-Perez n'a pas choisi de pseudo pour peindre. Elle a gardé son nom de baptême, Florina, originaire de Roumanie. Une histoire de vie personnelle que je ne raconterai pas ici.
Elle a suivi tout un parcours avant de comprendre que la peinture faisait partie d'elle et devait être au centre de sa vie. Pourtant, elle a commencé à peindre très jeune, à 15 ans, en suivant des cours en dehors du lycée. Elle a même fait ses premières expositions dès 16 ans. Une quinzaine quand même jusqu'à ses 19 ans. Mais pour elle, ça restait un passe-temps car elle ne voyait pas comment elle pourrait gagner sa vie grâce à sa peinture.
Elle a quand même choisi de faire des études artistiques. Après un bac littéraire option Arts plastiques, elle commence des études pour faire de la restauration de tableaux. Mais elle se rend compte très vite qu'elle n'a pas le profil. Il fallait être scientifique, minutieuse et surtout pas créative ! Elle lâche donc cette formation pour intégrer l'école l'art Emile Cohl. Mais elle arrête également avant la fin car elle voit trop d'amis ne pas pouvoir vivre de leur art.
Florina choisit donc une formation beaucoup plus... " professionnelle " avec un BTS en communication visuelle et une licence professionnelle multimedia et devient directrice artistique dans des agences de communication.
À la naissance de son premier enfant, elle prend une année de césure et réalise que ses priorités ont changé et qu'elle n'a plus envie de travailler en agence. Elle se met donc à son compte dans le domaine de la vidéo marketing.
Jusqu'en 2018 et sa rencontre avec Priscilla Otero, fondatrice de Dessine ta boîte qui déboîte. Celle-ci lance alors une formation pour les entrepreneuses. Florina lui propose d'organiser une exposition pour faire parler de la formation. Idée qui séduit immédiatement son amie. L'artiste doit alors trouver une thématique qui colle à l'activité de l'entreprise : les femmes et leur empouvoirement.
Dans le même temps, elle découvre les portraits photographiques de Frida Kahlo et s'intéresse de plus près à sa vie. Cela lui fait prendre conscience de toutes les souffrances vécues par les femmes dans leur vie (tant physiques que morales). Elle veut alors " projeter " Frida Kahlo dans toutes les femmes. Et surtout montrer que ces souffrances peuvent être dépassées et devenir un moteur pour aller plus loin et plus haut !
Cette exposition chez Pause Créations connaît un succès retentissant (plus de 800 personnes au vernissage) et Florina prend conscience du plaisir qu'elle a eu à organiser tout ça : travailler sur ses œuvres, faire appel à des rédacteurs et à la presse. Et surtout elle réalise qu'elle pouvait vivre de son art. Pendant 6 mois, elle poursuit son activité à côté de la peinture car une peur persiste en elle, celle du regard des autres, qu'on lui donne une image de bohème, ce qu'elle n'est pas du tout. Aujourd'hui, forte de ses expériences de vie, elle vit pleinement sa passion !
Les femmes au cœur de ses œuvres
Le désir de Florina est de faire passer des messages à travers ses oeuvres, en particulier pour les femmes. Elle veut que, lorsqu'elles viennent voir ses peintures, elles sortent regonflées à bloc ! Que, malgré tous les obstacles, elles prennent confiance en leurs incroyables capacités, que grâce à ces étapes de la vie, elles rebondissent encore plus haut.
La posture et le cadrage qu'elle donne aux femmes de ses portrais dégagent, en apparence, de la force. La souffrance ne se voit pas tout de suite. Cette douleur propre à chacune de nous, parfois douce et secrète ou omniprésente et destructrice, qui nous fait grandir certes, mais reste de la douleur tout de même.
Cette douleur se devine dans les regards doux et fragiles qui tranchent très subtilement avec la force qui se dégage du tableau. Florina cherche ainsi à donner un visage, mille visages, aux états d'âme.
Les fleurs et la couleur sont une introduction à une approche plus intime. Ce sont les préliminaires amoureux, on apprend à se connaître, la relation prend du relief.
La fleur est un symbole féminin important car elle exprime la femme forte et fragile, mais surtout unique. C'est pourquoi l'artiste emprunte la couronne de fleurs de Frida Kahlo pour couronner des femmes courageuses dans leur combat singulier et projeter ainsi Frida en toutes les femmes.
Quant à la couleur, c'est un outil esthétique certes, mais aussi le reflet de son humeur. Le fond donne le " La " et les autres couleurs vont venir s'accorder et graviter autour. C'est la raison pour laquelle Florina travaille essentiellement à la peinture acrylique. Quelques (rares) fois elle utilise le spray. Mais elle n'aime pas ça car la couleur est alors imposée. Or elle adore préparer ses couleurs. Elle peut passer des heures à rechercher la nuance parfaite de chaque couleur présente dans son tableau afin de créer une harmonie et transmettre son ressenti.
Inconsciemment, elle a été inspirée par le peintre Alfons Mucha. Elle se sent un peu le " Mucha " des temps modernes avec sa propre représentation des femmes et des fleurs dans ses peintures.
Son autre source d'inspiration est l'illustrateur de mode René Gruau. Cet artiste travaillait la ligne de ses dessins en simples courbes. En quelques traits seulement il représentait une silhouette féminine, un visage. Florina essaie de faire le moins de trait possibles pour que d'un simple regard on comprenne l'essence même de la personne.
D'abord il y a le regard. Le premier regard. La pose, la ligne du visage, la bouche. C'est là que l'histoire d'amour commence. Je retranscris la beauté en quelques lignes minimalistes pour dévoiler la signature, l'ADN ; l'essence et l'essentiel.
Plus on épure le trait, plus le travail est difficile pour rendre ce que l'on veut représenter. On ne peut se cacher derrière les ombres ou du volume.
Les portraits de femmes de Florina Aledo-Perez
Pour suivre l'activité de Florina Aledo-Perez, il y a son site ou son compte Instagram.
Avant la conclusion musicale choisie par Florina, je veux la remercier pour ce beau moment d'échange par un chaud après-midi d'août. Il tombait à pic ! Merci pour son regard bienveillant sur les femmes. Personnellement j'aime énormément son travail et à chaque fois, ses " femmes " me bouleversent et me donnent de la force dans le même temps.
Je vous encourage donc encore une fois à aller voir son exposition " Beyond the cards " au Fort Superposition.
Florina a choisi de partager avec nous un titre d'Évelyne Gallet, " La fille de l'air ". Une chanson qui nous parle de liberté.
Cette liberté que nous perdons un peu lorsque nous avons des enfants mais qu'il ne faut jamais complètement oublier. Florina la retrouve dans son activité artistique.