Je fais l'expérience de la paix
« Si tu ne trouves pas le calme, ici et maintenant, tu le trouveras où et tu le trouveras quand ? » La phrase a sur moi l’effet d’un électrochoc. Assise en tailleur sur un zafu, un coussin de méditation, face à un mur blanc, comme la vingtaine d’autres personnes venue participer à cette sesshin ( Retraite de méditation intensive, suivie, en l’occurrence, au Centre Dürckheim, à Mirmande - Drôme, dirigé par le maître zen Jacques Castermane) , je viens de prendre un coup dans le ventre. Je la connais cette citation de maître Dôgen, moine bouddhiste japonais. Mais, ici, dans le silence du dojo, et prononcée comme une douce évidence par Jacques Castermane, maître zen, elle me fait monter les larmes aux yeux. Cette notion de calme, soudain… Oui, c’est bien cela, en effet, que je cherche à atteindre dans l’urgence. Le calme. Cet état tant espéré, attendu, sans cesse reporté à « après » : « une fois ce dossier bouclé », « une fois les enfants couchés », « une fois en week-end »…
Zazen, c’est la voie de l’action. » « Action » : ce mot que je fais habituellement rimer avec précipitation et multiplication d’expériences se résume ici à ce que vit mon corps dans l’immobilité. Cela me paraîtrait fou si je n’étais pas en train de le ressentir à travers ma respiration et mon léger balancement qu’elle provoque naturellement. Les pensées m’assaillent, envie de bouger, des fourmis dans les pieds… « L’ego n’aime pas cette rupture avec son fonctionnement habituel. Alors il intervient : les pensées, de nouveau, nous habitent, inutiles. Pour arrêter leur flux, il nous faut retrouver l’attention à la respiration. » Et, sans cesse, « tout reprendre à zéro ». L’expression me rassure : elle me rappelle qu’il est toujours possible de revenir au calme. Entre deux séances de vingt-cinq minutes de zazen, cinq minutes de kin-in : l’expérience est la même, mais se vit debout, en marchant lentement. Très lentement. Dans une lenteur que je ne mesure plus, je tente de me laisser porter par le balancement d’un pied sur l’autre, doucement, je sens que chaque jambe travaille intensément, hanches, fesses… Coureuse de fond, j’apprends à marcher. « Zazen est terminé, l’exercice continue », invite Jacques Castermane. À l’extérieur du dojo, en préparant le repas, en dressant la table, en balayant la cour, je m’efforce de rester dans cette pleine conscience, attention précise à chaque action – qui, de fait, est lenteur. Étonnamment, cela ne me demande aucun effort : je n’ai pas la sensation de me contraindre à ralentir, mais de suivre un rythme interne qui tombe juste. Mon rythme. Je me sens bien.
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source : Psychologies magazine
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