La nature est la source de plus de la moitié des médicaments modernes que nous utilisons et aujourd’hui, l’accès aux outils de génomique, métabolomique, bioinformatique et d’intelligence artificielle nous permettent d’aller beaucoup plus vite dans la découverte de nouvelles molécules. C’est le credo de cette équipe du Centre Helmholtz de recherche océanique de Kiel (GEOMAR) qui vient de faire la découverte d’un composé marin, extrait de l’algue de la mer Baltique Fucus vesiculosus et qui promet des bénéfices anticancéreux et anti-infectieux.
Déjà 12 médicaments « vitaux » dont certains anticancéreux ont été développés à partir d'organismes marins et de leur microbiote symbiotique. Le processus de recherche d'actifs marins commence par l'extraction de macro et micro-organismes marins, suivie de la purification et de la caractérisation de leurs constituants chimiques bioactifs, qui peuvent représenter un potentiel pour le le développement de nouvelles thérapies. Ici, l’équipe qui a adopté des approches automatisées assistées par ordinateur, aboutit aujourd’hui à une nouvelle molécule marine qui pourrait constituer un traitement contre le cancer de la peau et certaines infections, dont à Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM), responsable d’infections nosocomiales. Après une première étape de fractionnement chimique rapide de l'extrait, un programme bioinformatique a été utilisé pour prédire le score de bioactivité de l'algue, en seulement quelques mois.
Dans la nature, le fucus vésical est souvent soumis à la formation de biofilm
Le fucus vésical, un anti-infectieux prometteur : Par conséquent, l’algue exposée à ces millions de micro-organismes présents dans l'eau de mer, développe une son autoprotection via les composés liés à sa membrane. Ces molécules, qui remplissent une fonction critique dans l’espace naturel, présentent souvent des activités connexes contre les agents pathogènes humains. « Le fucus vésical est une algue comestible, c’est un candidat attrayant non seulement comme source de médicaments, mais aussi pour les compléments alimentaires ou des agents de protection des aliments « , explique l’auteur principal, le professeur Tasdemir.
Le champignon Pyrenochaetopsis sp, un anticancéreux prometteur : De nombreux champignons vivent également en symbiose à la surface et à l'intérieur des algues. Ce sont également des sources prometteuses pour la découverte et le développement de nouveaux médicaments. L’équipe a donc également isolé plus de 120 champignons symbiotiques du fucus vésical et a étudié le champignon Pyrenochaetopsis sp. en détail, car il tue efficacement les cellules cancéreuses de la peau de type mélanome. Il induit une faible cytotoxicité et possède « un inventaire chimique très riche ». Les mêmes approches automatisées assistées par ordinateur ont permis d’isoler des molécules prometteuses. « Les champignons des algues sont une source établie d'agents anticancéreux naturels. Nous avons trouvé ici plusieurs nouveaux produits naturels, que nous avons appelés pyrenosétines A et B, qui ont un potentiel élevé pour lutter contre le cancer de la peau ».
Ces travaux rappellent que la biodiversité est aussi, via ces composés marins naturels, source de thérapeutiques précieuses, dont on aurait tort de se priver. Les nouvelles technologies permettent aujourd’hui de les isoler plus rapidement « pour en faire » des médicaments.
Source: Marine Drugs July 2020 DOI : 10.3390/md18060311 Bioactive Molecular Networking for Mapping the Antimicrobial Constituents of the Baltic Brown Alga Fucus vesiculosus (Visuel Larissa Büdenbender)
Équipe de rédaction SantélogJuil 4, 2020Rédaction Santé log