Il avait ras le pompon de ces plaisanteries qui lui tombaient dessus comme les gouttes de pluie sur Brest où l’homme à la barre, barra en sifflotant une chanson de Prévert.
Oui, il en avait ras le pompon de ces calembours douteux qui l’assénaient depuis qu’il avait avoué son athéisme.
Il faisait feu de tout bois : catholiques invétérés, orthodoxes indélicats, séfarades saouls foireux, et même sunnites à sornettes. La vanne qui revenait le plus souvent portait sur ses pupilles, ce qui le blessait doublement car il l’était de la Nation. - - Tu as de drôles de pupilles, dis, l’athée, se moquait régulièrement son collègue de travail, un pourtant pas gâté pour l’héritage visuel tout handicapé qu’il était d’un double foyer, ce qui se confirmait dans l’addiction à la bigamie.- Ta gueule, lui lâchait-il, las de cette boutade !
Il allait trouver la paix en se promenant dans les prés, un petit tour athée qui était loin de l’être. Il conservait sur lui un porte-bonheur venant d’une pâture, joli grigri qui s’en trouvait, dès lors, trèfle athée, comme par mimétisme. Oui, il ne croyait en aucun Dieu, car athée ! Il pratiquait l’art martial en guise de religion et, même athée, aimait mater son principal adversaire, athée lui aussi ! Il l’envoyait souvent au tapis et le pauvre s’entendait dire par l’entraîneur : - - Tu te prends pas mal de chocs haut, l’athée !
Alors, prenant la défense de son valeureux challenger, il lançait à ce moniteur zélé : - - Moi aussi je suis athée ! Je suis de son coté et vous ne verrez pas d’inconvénients à ce que l’athée râle !
L’entraîneur ne comprenait rien à la subtilité de ce langage eu égard au niveau d’études qui rasait les pâquerettes austères assez ! Son brillant vaincu, Salim, venait du sud, et, de son côté subissait souvent : - Tu es métèque, l’athée ? Oui, il aimait s’éclater sur un tatami, comme une ivresse ! Cette soif c’est l’athée qui l’a ! Qu’il soit d’ailleurs ou d’ici ! Les deux rivaux, devenus amis, ne voulaient pas jouer les candides athées et ne postulaient pas pour situation de naïveté pérenne. Ils savaient pertinemment, par une simple intuition, que dans les chaumières de bonne foi religieuse, on cassait du sucre sur les vilains de l’athéisme. L’athée laid pâtit ! Ils n’en avaient cure de ces buveurs de vin de messe qui rendent affreux l’athée et refusaient de répondre aux abordages des lazzi, ce qu’eût pu faire le pire athée. Non, pas le moindre écart de conduite ! - - Si l’écart happe athées, c’est mauvais, disait-il à Salim ! Il vaut mieux retrouver sa bergerie de moutons sages ! Oui, sois doucereux l’athée, d’où se relater des bons moments empreints de positif en évoquant des souvenirs de voyage où les lieux pouvaient bien avoir hérité de leur essence : ô Rhodes athée, et les steppes athées qui laissent t’épater ! Tous deux avaient beaucoup voyagé, pour oublier cette ville qu’ils eussent aimée moins religieuse ! Pourquoi ne pas connaître Mende athée ? Ils étaient assez lucides pour mesurer qu’aucun lieu n'est en forme athée ! Même la ville qui porte ce nom ne peut prétendre à croire en l’athéisme, foi de Bourguignon ! Mais, une fois encore, ils n’en avaient cure ! Ils se le disaient tout en sirotant, dans une tasse à thé, une tisane, heureux d’être ensemble, assis sur la terrasse en blanc, pour l’athée rassemblant !