Irashaimase
Soleil vert, la femme-meuble de l’appartement de Thorn. Concept aussi insupportable moralement que fascinant. Je l’ai rencontrée ici à Osaka. A 9h40, je sors de la gare, monte l’escalier, traverse la passerelle. Il faut ensuite entrer dans le magasin Grand Front, puis prendre les escalators jusqu’au rez-de chaussée. La route est un peu longue.
Irashaimase. (Prononcez Ilashaïmassé) Bienvenue en japonais. La phrase est prononcée délicatement, le corps légèrement incliné vers l’avant, les mains sagement posées l’une sur l’autre au niveau du pubis. Chignon noir laqué, fond de teint ambré, lèvres glossées. Léger sourire figé. Les yeux se ferment en même temps que l’inclinaison. Je passe, un peu gêné. Regard discret en arrière pour voir ce que compte faire la fille après. Elle salue de la même manière la personne qui me suit. Je suis surpris par un second Irashaimase qui vient de ma gauche. Femme-meuble identique, même tailleur blanc, jupe droite en dessous du genou, foulard et escarpins bleu marine.
Le visage est serein. Aucune trace d’impatience ou d’agacement. Je ne peux m’empêcher de fantasmer sur le sort de ce mobilier humain. Depuis quand, combien d’heures, est-ce volontaire. Les chaussures sont-elles confortables ?
Rémi Brun