C’est un spectateur qui écrit. Olivier Neveux ne prétend pas préconiser ce qu’il faut faire, ni comment le faire. Il analyse la situation sous trois points de vue : d’abord l’état (désastreux, il faut bien l’écrire) de la politique théâtrale depuis une vingtaine d’années (sous les présidents de la république : Sarkozy, Hollande, Macron), puis le théâtre qui laisse les spectateurs à leur place et leur dit ce qu’ils doivent penser, pour aboutir à une troisième partie où les choix de mises en scène et d’approches travaillant sur ces rapports entre scène et salle, entre bien et mal permettent une sorte d’interaction véritablement politique. Ce résumé est, bien sûr, réducteur. Le livre foisonne de citations, ne donne pas de leçons, cherche à faire émerger les enjeux liant ou opposant théâtre et politique. Et présente, pour argumenter, de nombreux spectacles, dont je n’ai vu que très peu. Mais, à la lecture de l’ouvrage, il m’est arrivé de penser à tel spectacle de rue, à tel dispositif scénique dérangeant ma position de spectateur et favorisant ma perception de questions politiques. Le théâtre politique s’adresse souvent à des spectateurs convaincus de ce qu’ils vont voir et entendre, sur des sujets dans « l'air du temps ». La nécessité, aujourd’hui est sans doute de résister à la neutralisation réciproque du théâtre et de la politique. Ne pas venir chercher ce qu’on sait qu’on va trouver, mais accepter d’être dérangé « dans un lieu où se jouent l’ombre et la nuit », le théâtre instituant, pour reprendre les mots de Jacques Rancière, « l’égalité des capacités et des intelligences ».