Magazine Bien-être
S'il n'y a pas un petit changement, plus un petit changement, plus un autre petit changement, il n'y aura jamais pour finir une grande transformation. Or, dans ce domaine, attention moyenne, c'est-à-dire celle qui sert à l'existence courante, plus attention moyenne, plus attention moyenne, c'est rien puis rien puis encore rien. Nous avons à exercer un effort actif pour recevoir, comprendre, assimiler; alors la vérité prend racine en nous et nourrit ce personnage particulier du disciple, seul « centre de gravité permanent » dans notre existence. Par l'effort conscient une petite graine va devenir un arbre immense. Car ce que nous appelons habituellement conscience n'est pas une conscience digne de ce nom. La conscience apparaît avec le degré supérieur de l'attention, quand les trois fonctions y participent, tête, coeur et corps. C'est sans aucun doute un élément de croissance intellectuelle que de lire avec beaucoup d'attention des idées nouvelles, difficiles, surprenantes peut-être, mais vous concentrer dans cet effort intellectuel actif n'est pas encore suffisant. Il faut que le corps participe avec une certaine sensation, une manière d'être là, un abandon à la respiration. Il est évident que vous ne pouvez pas passer l'existence dans une posture rigide et hiératique dite « de méditation ». Il faudra bien apprendre à vivre un relâchement du corps, une tranquillité de la respiration, un contrôle sur les différentes tensions sans que cela se voie du dehors. Et enfin la vivante attention du coeur donne leur sens aux deux autres. A cet égard vous constatez que vous êtes très démunis. La plupart du temps ce sentiment, cette intelligence du coeur, vous fait défaut parce que vous êtes sous l'emprise d'une coloration émotionnelle qui influence vos pensées et vous empêche de voir la réalité telle qu'elle est. Et ce qui vous est possible face à vos états intérieurs, au prix de cette intense vigilance, c'est d'abord de voir et reconnaître, le « See and recognize » de Swâmiji. Celui-ci ne s'accomplira pas tout seul, s'il n'y a personne pour voir et personne pour reconnaître. Vous apparaissez et pour un moment vous êtes : je vois et je reconnais, je me désengage par le non-conflit et l'acceptation, je me rapproche de la conscience témoin. Et qu'est-ce que je vois, au niveau physique, émotionnel, mental et le plus souvent les trois ensemble? Des formes que je peux nommer. Ceux qui connaissent tant soit peu la doctrine hindoue se souviennent – mais avec quelle qualité d'attention? – de nama et rupa, le nom et la forme.
La voie et ses pièges
Arnaud Desjardins
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