À cause de la pandémie du Coronavirus, le film Capone (Fonzo chez nos cousins) est sorti directement en VOD. Un long-métrage intriguant mais pas follement intéressant.
Libéré de prison mais surveillé dans sa villa en Floride, Al Capone passe les dernières années de sa vie rongées par la démence. Après le traumatisme de ses 4 Fantastiques, Josh Trank attendra 5 ans pour nous proposer un nouveau film. Si le résultat est discutable, il faut reconnaître au jeune réalisateur d'avoir tout fait pour maintenir sa vision en officiant à l'écriture, au montage et derrière la caméra de ce biopic dégénéré.
Projet pour le moins original, le réalisateur de Chronicles choisi de mettre en lumière dans son long-métrage la fin de vie du plus célèbre gangster américain. Un angle inattendu mais pas forcément passionnant, d'autant plus que l'ancien parrain de Chicago n'est plus que l'ombre de lui-même, sénile et incontinent. Pourquoi pas.
Al Capone Parano
Ce qui nous choque en premier lieu, c'est l'aspect inintéressant qui se dégage de cette œuvre singulière. Débarrassé de toute la superbe qui entoure le mythe de l'ancien leader des Outfits of Chicago, cette retraite particulière laisse dubitative. Sans véritable intrigue que celle contemplative de la fin du monstre, on se demande où on va. Faux MacGuffin monétaire, discours éméché sur la filiation du malfrat, critique sociale à peine effleurée, longueurs narratives et étude de personnage sur le tard, Capone se fait désirer, peine à fasciner d'un bout à l'autre.
La présence de Tom Hardy dans le rôle-titre fait toutefois planer une sorte de mystère alléchant, le bonhomme étant réputé pour s'investir dans des rôles inédits. Et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il s'agit là de la performance la moins flatteuse pour l'acteur britannique, mais qui restera comme un nouveau tour de force, quoique frôlant la caricature mal engagée, risible et laconique. Mais c'est engoncé sous des tonnes de maquillages, des lentilles sanguinolentes, des couches culottes, c'est en grognant, bavant ou en se faisant littéralement dessus que le mythe est définitivement déconstruit.
Voilà qui vient faire sens avec la filmographie de Josh Trank, toujours en quête de transcrire " la déconstruction du mythe, de figures iconiques ou d'idées ". En cela Capone est une réussite, même s'il y transparait forcément une forme d'idéalisme intrinsèque du gangster éternel. Véritable légume (avec sa carotte en guise de cigare), incapable d'articuler plus de deux mots sans se faire dessus, ce Fonzo entache à bon escient la représentation populaire de Scarface. De quoi proposer le véritable point fort du film, sa vision hallucinée, pleine de remords, servie par une réalisation aussi folle que généreuse.
Pour filmer la fin de Capone, le réalisateur prend le pari risqué d'axer son récit sur les divagations de son esprit malade. Entre flashbacks et hallucinations, on navigue dans des pérégrinations introspectives parfaitement photographiées par le vétéran Peter Deming (Mulholland Drive) qui propose des envolées surréalistes, oniriques et d'une violence crue où le montage alterné et à base de cuts away, match cuts ou de jump cuts finissent de proposer un sentiment traumatique. En effet, à travers ces élans chimériques, Trank offre la vision d'un homme traumatisé par ses propres monstruosités.
Malgré des longueurs narratives un peu pénibles, Josh Trank parvient à faire de Capone une œuvre inédite, inventive et délirante.