Lectrices percussionnistes, lecteurs batteurs, vous avez forcément écouté pendant des heures le jeu fin et subtil du batteur Jimmy Cobb (1929-1920).
Il était le dernier survivant d'une séance magique qui vit naître l'album clef du Jazz moderne, le plus beau, le plus grand, le plus vendu aussi, " Kind of Blue " de Miles Davis (1959). Cf extrait audio au dessus de cet article.
Un sextet de magiciens qui mêlait les 4 éléments: l'eau pour Bill Evans au piano, le feu pour John Coltrane au saxophone ténor, l'air pour Julian Cannonball Adderley au saxophone alto et Miles Davis à la trompette, la terre pour Wynton Kelly au piano (sur un morceau de l'album), Paul Chambers à la contrebasse ( Mr P.C composa John Coltrane en son hommage) et Jimmy Cobb à la batterie.
Ce sextet était une toupie. Tout le groupe tournait autour d'un point fixe, la batterie de Jimmy Cobb.
Si vous voulez faire découvrir et aimer le Jazz à quelqu'un qui ne connaît rien à cette musique, offrez lui " Kind of Blue ". S'il n'aime pas, n'insistez pas. Le Jazz n'est pas fait pour lui. J'ai offert cet album il y a 25 ans à un ami. Après la première écoute, il m'a dit: " Après avoir écouté cet album, j'ai eu envie d'écrire mes mémoires de détective privé ".
Peu de temps après la sortie de " Kind of Blue ", Dizzy Gillespie, le Maître de Miles Davis, lui en demanda un exemplaire. " Dizzy, Columbia ne t'en a pas envoyé? " lui demanda Miles. " Si, Miles, mais j'ai usé le disque en une semaine à force de l'écouter " lui répondit Dizzy.
60 ans après cet enregistrement mythique, Jimmy Cobb partageait encore son expérience dans des master classes pour des apprentis batteurs.
Miles Davis conserva la rythmique Wynton Kelly, Paul Chambers, Jimmy Cobb en studio et en tournée jusqu'à 1963; année où il changea d'univers avec une autre rythmique qui, elle aussi, faisait pâlir d'envie tous les chefs de petites formations de Jazz, Herbie Hancock, Ron Carter et Tony Williams.
Quant à la rythmique Wynton Kelly, Paul Chambers et Jimmy Cobb, elle fut ensuite employée par des leaders de la trempe de Wes Montgomery (album " " absolument indispensable ) et Joe Henderson (albums " " & " Straight no chaser " vivement recommandés). Jimmy Cobb accompagna aussi la Divine Sarah Vaughan durant les années 1970.
Si vous trouvez la rythmique Wynton Kelly, Paul Chambers, Jimmy Cobb sur un album de Jazz, vous savez lectrices percussionnistes, lecteurs batteurs, que vous allez vous régaler. Ca swingue terrible mais tout en finesse, en retenue, sans effort apparent.
" Miles Davis a mis la lumière sur moi " (Jimmy Cobb). Cet homme discret le méritait.
Dans la vidéo ci-dessous, datée de 1959, 10 ans après les séances de " Birth of the cool ", autre album culte de Miles Davis, Gil Evans dirige l'orchestre, Miles Davis est le soliste à la trompette. Derrière, Paul Chambers et Jimmy Cobb assurent la pulsation rythmique indispensable à la marche de la musique. Une leçon de mesure.