Quels sont ces ingrédients ? Ils sont principalement de deux catégories. La première est l’aide du Xuan Xue 玄学, c’est-à-dire la science (ou proto-science) des Talismans (Fu), mudras, mantras et parfois certaines marches sacrées spécifiques, qui utilisent très souvent des successions de pas liées à des constellations. A quoi sert cette première catégorie d’enzymes ? A trois choses différentes. 1) Dans les processus initiaux, cette aide permet d’une part de protéger la pratique, et d’autre part « d’arrêter les saignements », c’est-à-dire, métaphoriquement, toutes les pertes d’énergie. Précisons que dans les arts du mystère chinois, « saignement » réfère à toute perte vitale, mais pas seulement sur un plan purement biologique. Au sens symbolique, toute perte significative récurrente est un saignement : perte d’argent, perte d’objets, pertes de relations ou de partenaires, de jobs, perte d’énergie sur problèmes émotionnels récurrents, etc.. Tout cela constitue un « saignement » qui empêche le calme du Cœur nécessaire à la pratique. Rappelons ici que le Cœur est justement nourri par le Sang, et si celui-ci fait défaut, que ce soit au sens propre ou figuré, ses fonctions ne pourront pas se stabiliser et les instances psychiques ou universelles qui lui sont liées, comme le Shen (Esprit), demeureront instables. Cet arrêt du « saignement » est donc primordial, et va bien au-delà du simple contrôle de l’éjaculation ou de l’arrêt des règles (décapiter le Dragon Rouge) que l’on voit cités dans tous les manuels, mais qui ne sont que des aspects spécifiques et matérialistes de l’étape de « L’arrêt du saignement ». Dans cette première étape, donc, les Fu utilisés et consommés selon un mode précis visent essentiellement à aider le pratiquant à arrêter de « saigner » et à le protéger. 2) Une fois que les pertes sont arrêtées et que l’énergie du pratiquant s’est stabilisée et a retrouvé un degré d’intensité au moins normal (aidé parfois par des pratiques corporelles que je ne détaille pas ici), on peut alors commencer un travail spécifique sur le changement qualitatif, et plus uniquement quantitatif, de notre énergie. A ce stade, on utilise beaucoup les mantras ou incantations, de pair avec les talismans, qui visent à purifier les énergies et à nous débarrasser des « impressions » du passé. Non pas que l’on veuille effacer nos souvenirs, mais le travail vise à enlever tout ce qui pourrait constituer un blocage d’énergie et une entrave à sa libre circulation. A ce stade, la nature des talismans change et on utilise d’autres « jeux », de manière cyclique. 3) Enfin, dans un stade ultérieur, on utilise conjointement marches, mudras, mantras et Fu qui sont alors plutôt utilisés pour amener quelque chose que l’on pourrait qualifier de « lumière » dans le corps du pratiquant, mais constitue également un lien, un canal avec le divin ou le réel ultime. Ce sont des Fu qualifiés de pur Yang dans la tradition. Dans cette phase, la qualité vibratoire du pratiquant est très élevée et très subtile, et comme sa fréquence et sa « longueur d’onde » s’est rapprochée suffisamment du divin, par résonance, des messages peuvent passer d’un plan à l’autre, du divin à l’humain ou de l’humain au divin. Précisons peut-être pour finir cette première partie enzymatique, que ces trois étapes sont découpées ici pour des raisons didactiques, mais qu’en réalité, les choses sont plus subtiles que ça et que c’est le maître ou l’enseignant spirituel en charge de la personne qui observe et donne les aides au bon moment. Ou ne les donne pas, s’il ou elle estime que le pratiquant n’a pas fait son job de son côté. Passons maintenant à la deuxième catégorie d’aide : il s’agit de l’aide des sciences métaphysiques qui calculent la spatio-temporalité. En alchimie interne (méditation taoïste), celle que l’on utilise spécifiquement est le Qi Men Dun Jia, une méthode de stratégie qui calcule comment poser la bonne action au bon moment pour un pratiquant en particulier. Ces calculs découlent en effet en partie de la date et du lieu de naissance du pratiquant, c’est-à-dire du « flash » énergétique qui l’a imprégné au moment de son arrivée dans le monde et qui a influencé la constitution de sa trame énergétique.
Fabrice Jordan