Un monde à nous est un vrai film d’acteur, puisque face au wonderful Baer se dresse Anton Balekdjian, novice d’une dizaine d’années, et valant bien mieux que son statut originel de fils-du-réalisateur. Comme on dit, le gamin a vraiment un truc, arrivant à se hisser à hauteur de son prestigieux partenaire dans un film où le duo est souvent seul à l’écran. Il fallait bien deux acteurs de cette trempe pour faire exister jusqu’au bout le mystère du scénario, cette fuite en avant pour échapper à des tueurs tapis dans l’ombre ou, en tout cas, à un mal de ce genre. En même temps que le jeune Noé, on suit et on s’interroge sur ce père mutique et exigeant, qui dissimule un secret que l’on devine douloureux. C’est là la clé du film : qu’est-ce qui se cache derrière cette traque ?
En attendant, Noé subit un entraînement intensif pour faire face aux éventuelles attaques extérieures. Ce qui donne lieu à quelques scènes impressionnantes, mais également à quelques séquences laissant un peu dubitatif quant aux intentions de Frédéric Balekdjian : s’il voulait nous faire flipper, c’est raté ; sinon, tout va bien. Le réalisateur réussit en tout cas la description de l’enfermement du gamin et de son père dans des mensonges, des non-dits, un refus de socialisation qui semble indispensable mais génère également beaucoup de douleur. Dommage que les dialogues et les prestations des autres gamins du film soient moins satisfaisants…
Puis vient l’heure de la dernière bobine ; là, le film est victime de la maladresse de son réalisateur, qui peine à faire comprendre clairement ses intentions, divisant le public alors que ce n’était pas là son but. Montage manipulateur ou narration mal foutue ? Difficile de trancher ; quoi qu’il en soit, cette conclusion hasardeuse nuit fâcheusement à Un monde à nous, qui crée beaucoup de frustration malgré ses images de fin, émouvantes et convaincantes. On saisit enfin le propos, trop tard cependant pour ne pas être très agacé par le demi gâchis auquel on vient d’assister.
6/10