Le retour à l’anormal a bien eu lieu. Certes, c’en est fini de cette fichue attestation pour sortir acheter la moindre baguette. L’horizon s’est même dégagé pour les plus chanceux qui pourront se ressourcer dans la nature ou auprès de leurs proches.
Un petit goût de liberté viendra même chatouiller le palais des plus optimistes, même si une scrupuleuse police des corps devra être respectée. Mais le scénario du « D-Day » macroniste ressemble encore beaucoup trop au Jour sans fin. Une immense majorité des douze millions d’élèves ne retrouveront pas le chemin de l’école cette semaine, contrairement à ce qu’avait annoncé le président de la République le 13 avril. De nouveaux salariés, la peur au ventre, ont rejoint dans les transports en commun la cohorte des travailleurs et surtout des travailleuses « de première ligne ».
Loin de la libération tant attendue, chacun a donc compris que l’heure n’est pas venue de tourner la page, et que la vie sous Covid ne fait que commencer, sur une fine couche de glace. Sans tests, ni masques gratuits pour toute la population. Comme si, lors d’un naufrage, le capitaine demandait aux passagers de sortir leurs chéquiers en échange d’une bouée de sauvetage ! Mais si le jour J laisse un goût si amer, c’est qu’il s’est imposé dans la défiance, une exception française. Alors qu’une majorité d’Européens estime que leur gouvernement a été « à la hauteur » de la situation, les deux tiers des Français (66 %) pensent l’inverse. Comment pourrait-il en être autrement quand l’exécutif a menti sans vergogne, tenu le peuple à distance en s’arrogeant les pleins pouvoirs ? Même sa propre majorité commence à ouvrir les yeux, menaçant l’unité de l’édifice macroniste à l’Assemblée nationale.
La vie politique est plongée dans une situation totalement inédite : un président désavoué et détesté qui concentre tous les pouvoirs, et que seul protège le confinement des colères. Qu’en sera-t-il quand le rapport de forces politique reprendra ses droits, que les soignants redescendront dans la rue avec la détermination de ceux qui ont croisé la mort de près ? Il serait temps de penser à l’après… Macron.