Le confinement favorise le visionnage, alors voici déjà une belle fournée pour la première moitié du printemps à peine ! Des films et des séries donc... :
de Maty Diop
Sortie salles France - octobre 2019
Grand Prix - Festival de Cannes 2019
Un film qui détonne, braquant sa caméra sur le Dakar d'aujourd'hui, sur le revers nocturne de la face du développement économique, sur les drames qui se trament à la nuit tombée : des rencards amoureux clandestins à 2 jours d'un mariage arrangé, des bars où les filles attendent les garçons, ces derniers décidant du grand voyage par l'Atlantique, des zombies sans pupilles qui viennent venger les disparus et les bafoués. Romance, thriller, fantastique.
Univers social des malmenés et incompris, des jeunes aux troubles autistiques graves dont les structures agréées ne veulent pas. Un Vincent Cassel au jeu implacable avec l'adoré Reda Kateb, un vrai duo plus vrai que nature.
C'est un film léger, un petit road trip, le chemin d'une femme à la dérive tout en restant forte. Un film qui vaut surtout pour le bonheur de (re-re-re...)voir Catherine Deneuve, sa nonchalance, son naturel, son jeu qu'on aime tant. Bettie, la soixantaine, à la tête d'un restaurant, se retrouve engluée de dettes, et de chagrin suite au départ de son amant. Elle part, quitte tout, mais retrouve un temps sa fille rancunière de la voir si peu, et son petit fils, qu'elle va devoir garder.
Un film biographique sur les dernières années de la très courte vie de Camille Lepage, photographe de guerre décédée à 26 ans en 2014 au cœur du conflit centrafricain. Une vraie claque, l'admiration pour ce bout de femme déterminé, cette demoiselle solide avec sa répartie, son assurance, sa détermination. Elle n'avait pas les grigris autour de son buste, ses bras, son torse, mais elle avait la sincérité, et la reconnaissance acquise péniblement, car être Blanche, c'était un problème, c'était son problème. Au côté de rebelles, les anti-balakas, elle va progresser vers le front de guerre, elle va affirmer sa liberté de ne pas être vue comme une proie ou une prédatrice espionne. Elle se pose toujours les questions, qu'est-ce qu'elle fait là ? Pourquoi se sent-elle bien si loin ? Comment photographier sans cautionner ces crimes de vengeance ?
Dakar. Satché (joué par Saul William) est condamné, sacrifié, destiné à mourir dès la fin de cette journée. Alors il va faire ses choix, voir celles et ceux qu'il souhaite revoir, partager en douceur, comme en lévitation, dans le brouhaha de la ville, ses dernières heures. Un homme résigné, - mais est-on jamais prêt pour mourir ? n'est-ce pas finalement une chance que de connaître son heure ? - que l'on suit de près, aux côtés du second personnage joué par la ville de Dakar. Film lent, mais atmosphère très englobante.
Une franco-tunisienne retourne s'installer à Tunis, et concrétiser l'ouverture de son cabinet de psychanalyse, sur un toit de Tunis, non sans difficultés administratives, culturelles, relationnelles avec le voisinage. Il y a beaucoup d'humour dans ce film, et également le cri de rage d'une jeunesse qui veut placer ses espoirs sur sa terre natale. Malgré l'absolu plaisir de voir
Golshifteh Farahanià l'écran, l'histoire souffre peut-être d'un brin d'immaturité, mais sa fraîcheur est aussi sa force et son message.de Michael Dudok de WitSortie salles France - juin 2016Prix Spécial Un Certain Regard - Festival Cannes 2016
Ce film d'animation sans paroles est un métissage entre la tradition d'animation japonaise et les studios Ghibli, et un certain regard européen sur la mythologie et les préoccupations écologiques. Un homme échoue sur une île déserte, puis échoue par trois fois d'en partir à bord d'un radeau de bois. Une tortue rouge apparaît un jour comme étant la source des destructions du bateau de bois, mais aussi comme l'espoir d'une compagnie, par sa transformation en une ravissante femme. Onirisme, imaginaire, poésie et éloge des forces de la nature et de la création, ce film est un bonheur esthétique, mettant l'accent sur la musique et les sons illustrant le concert des éléments naturels. Vu et validé avec et par les enfants.
Maxime vit entre sa mère alcoolique et ses potes d'enfance. Lors une soirée, une amie va, pour les besoins d'un film, demander à Matthias et Maxime de s'embrasser alors que Maxime s'apprête à quitter le Canada pour 2 ans en Australie.
Ce baiser va faire remonter à la surface un passé d'attirance et bouleverser leurs équilibres sociaux, notamment celui de Matthias, en couple. Avec toujours les thèmes de prédilection de l'homosexualité, la création, les rapports mère-fils, Xavier Dolan livre un film techniquement très bien réalisé, très pudique et à la fois très intime avec probablement beaucoup d'autobiographie, mais dans lequel il manque peut-être un ingrédient de folie, de dramaturgie, d'éclat...Salvador est un réalisateur en pleine souffrance : souffrances physiques multiples, chroniques, et souffrance psychique due à l'incapacité d'exercer. Alors, des rencontres, des retrouvailles, des souvenirs. Sa mère, ses amours, son succès. Et maintenant, la plongée dans l'héroïne...
PLAY ***
d'Anthony MarcianoSortie salles France - Janvier 2020Le jeune Max (Boublil) de ses 13 ans en 1993 jusqu'aux années 2010 s'est filmé, avec ses amis, ses parents, son quotidien, ses vannes, ses échecs. C'est une comédie très attachante, drôle, nostalgique, distillant avec un plaisir visible, des références qui parleront aux trentenaires et quarantenaires.NOTRE-DAME **
de Valérie DonzelliSortie salles France - décembre 2019Maud Crayon travaille dans un cabinet d'architecte et sur un malentendu elle doit mener à bien le projet de réaménagement du parvis de la cathédrale Notre-Dame-de-Paris. Cela fera beaucoup de chose à mener avec le père de ses enfants qui s'accroche envers et contre tout, et un amour de jeunesse qui resurgit en journaliste charger de la filmer... Il y a toujours l'humour, l'originalité de Valérie Donzelli, sa liberté légère, et le jeu toujours parfait de Pierre Deladonchamps, mais au final, ce film n'arriva pas à marquer, hormis quelques scènes dansées assez réussies.
GLORIA MUNDI ****
de Robert GuédiguianSortie salles France - novembre 2019Un très bon cru de Guédiguian, un
film transgénérationnel, une famille avec parents, enfants, petits-enfants, un sorti de prison, et les galères de la jeunesse contemporaine. Un film avec la nostalgie de toujours, avec des acteurs immuables et intemporels, mais aussi et cela m'a surpris, une réalité très moderne.Sortie salles France - février 2020
Un documentaire peaufiné, si bien amené avec l'interview du personnage principal en train de lire le scenario qu'on en croirait une fiction. La voix du narrateur porte une analyse à mesure que les images se déroulent, une distanciation, un recul pour étudier ce jeune homme, Bastien, 20 ans, militant FN, ses envies, ses peurs, ses souvenirs, ses amertumes. Un résultat étonnant et novateur.
LES GARDIENNES ****
de Xavier BeauvoisSortie salles France - décembre 2017
Première série sur l'univers du rap français, un microcosme théâtre de toutes les passions, les luttes, les trafics, les combats, les ascensions et les trahisons. Avec Clément, joué par le rappeur Hatik, on voit débarquer avec fracas lors d'une émission de Planète Rap sur Skyrock un jeune au visage de Moha la Squale et à la crinière de Rilès pour défier avec brio au micro, la star établie MaStar. Le seul bémol, c'est ce trop grand écart peut-être entre une assurance indéfectible d'Apash (Clément) et ses moments d'intense naïveté admirative... Série très réussie qui se binge à souhait....avant de visionner le Lac des Cygnes....
BUREAU DES LÉGENDES - Saison 5 ****d'Eric Rochant puis Jacques AudiardSortie Canal+ - avril 2020
Cette première saison qui englobe les tomes 1 et 2 de Vernon Subutex de Virgine Despentesest une totale réussite. Romain Duris joue et est Vernon, on est avec lui, il est totalement solaire, touchant. Tellement qu'à la fin, à le quitter alors qu'il quitte son banc des Buttes Chaumont pour rejoindre les amis, on veut en être, on veut faire partie de la bande. Un corps est donné à Alex Bleach, une voix aussi, bref c'est comme si le roman avait davantage pris forme à mes yeux.
En ce temps de confinement, c'est la série dans laquelle se plonger, pour regarder avec les yeux du possible les peurs, les paniques, les ruées et les combats auxquels les femmes et les hommes vont céder dans un monde de pénurie, d'abandon, de panne, et de recherche de lieux pour la survie. Très rythmée, cette série qui veut illustrer la collapsologie et l'anticipation écologique, a le mérite de mettre en scène un monde effrayant, très proche du nôtre malgré tout. On ne sait pas ce qui s'est passé, mais aujourd'hui on sait que tout peut arriver. L'Effondrement s'intéresse au jour d'après. L'épisode de la maison de retraite est poignant, en poussant au maximum la situation, un dénuement extrême, le personnel réduit à un unique dévoué, les moyens coupés...
Sortie Arte - avril 2020
Le groupe international Exxya va entamer une sacrée restructuration, et pour commencer va virer 1000 personnes sur le site de Beauvais, très syndiqué. Pour ce baptême du feu, la stratégie RH sera de faire d'une pierre deux coups : simuler une prise d'otages et sélectionner parmi les cadres le meilleur à même de résister face à la violence, à même de favoriser jusqu'au bout les objectifs de l'entreprise au détriment de sa survie personnelle ; et également de recruter le meilleur recruteur qui officiera, interrogera, stressera au maximum pendant cette prise d'otages. Un thriller social cynique.