05/05/2020 – POLITIQUE. « Déconfinement. Édouard PHILIPPE échoue à répondre aux inquiétudes » Par Cyprien CADDEO

Publié le 05 mai 2020 par Particommuniste34200

Le premier ministre a présenté ce lundi au Sénat, une semaine après l’avoir fait à l’Assemblée nationale, sa stratégie en vue du 11 mai. Malgré quelques précisions, les incertitudes n’ont pas été levées et le plan a été rejeté.

Un grand oral après l’autre. Après l’Assemblée nationale, il y a une semaine, Édouard Philippe présentait son plan de déconfinement devant les sénateurs, hier, au Palais du Luxembourg. L’occasion de défendre le choix du 11 mai dans les mêmes termes que devant les députés, et de vanter la décision de miser sur la responsabilité individuelle des Français davantage que sur celle de l’État : «  La réussite du déconfinement reposera sur l’adhésion de nos citoyens, qui est un moteur infiniment plus puissant que la contrainte » , a justifié le locataire de Matignon. Cette fois sans succès, puisque seuls 81 sénateurs se sont prononcés pour, contre 89 votes défavorables et 174 abstentions.

Toujours pas d’« atténuation de la responsabilité » des maires

Le premier ministre avait tout de même réservé quelques nouvelles annonces à la Chambre haute. Il a notamment dévoilé qu’une aide de 200 euros serait versée dès mi-juin aux moins de 25 ans, précaires ou modestes, qui touchent des APL. Huit cent mille jeunes seraient ainsi concernés. Il a également promis des mesures prochaines pour le secteur culturel.

Édouard Philippe a aussi confirmé que «  l’État financera 50 % du prix des masques grand public commandés par les collectivités » et qu’«  il reviendra aux maires et aux préfets d’en organiser la distribution » . Car c’était bien évidemment du rôle des élus locaux dont il était surtout question, à la Chambre haute. Alors que de nombreux maires s’inquiètent que le gouvernement ne leur renvoie la responsabilité du déconfinement, y compris pénale (voir événement), le premier ministre a de nouveau plaidé pour un «  retour à la vie normale progressif et adapté à chaque territoire » et appelé au «  discernement de chacun » .

Le chef du gouvernement s’est néanmoins prononcé contre une «  atténuation de la responsabilité » des édiles, comme le souhaitent certains sénateurs ou encore François Baroin, le président de l’Association des maires de France. Une revendication qui concerne surtout la brûlante question des réouvertures d’écoles, lundi prochain. Le spectre de sanctions n’est donc pas totalement dissipé, comme l’a rappelé le sénateur Philippe Adnot. «  Le protocole sanitaire est un document de 63 pages qui fait peser un risque maximal chez les maires ! Que feront-ils si 80 % des parents décident d’envoyer leurs enfants ? », s’est-il emporté, rappelant que le gouvernement a fait le pari qu’au moins un foyer sur deux gardera sa progéniture à domicile. «  Il est urgent d’attendre pour que l’école ne devienne pas le creuset d’une seconde catastrophe sanitaire » , a rebondi le socialiste Patrick Kanner. «  La reprise de l’école semble plus dictée par la nécessité économique que par une volonté de réduire les inégalités », a jugé quant à elle la communiste Laurence Cohen.

La sénatrice du Val-de-Marne a saisi la balle au bond pour étriller les modalités du vote du plan de déconfinement. « Vous ne nous demandez pas d’enrichir votre plan, simplement de le voter tel quel, vous nous demandez un vote de confiance, a-t-elle résumé. Or, Monsieur le premier ministre, vous avez largement entamé votre capital confiance auprès de l’opinion publique. Avec votre gestion calamiteuse des masques, comment vous faire confiance ? »

La stratégie de la majorité encore en suspens

Des critiques également martelées de l’autre côté de l’hémicycle par le sénateur LR Bruno Retailleau. «  Nous ne pouvons plus vous faire confiance, car votre parole a fait l’objet de trop de contradictions, de contre-vérités aussi, les Français ne sont pas sots, ils s’en sont rendu compte » , a assené une première fois l’élu vendéen, avant de replanter une banderille : « Maintenant, vous plaidez l’humilité. Cest un sentiment auquel ni le président de la République ni votre majorité ne nous avaient habitués, cela ne doit pas être un paravent à votre retard à l’allumage. »

Une référence au discours du premier ministre, qui a déclaré : « I l y a encore beaucoup de choses que nous ne savons pas, mais il y a quelques mois nous ne savions rien. » Édouard Philippe a par ailleurs rappelé que le déconfinement n’est pas encore garanti : « En cas de relâchement, le nombre de nouveaux malades pourrait être bien supérieur à ce que prévoient nos modèles, et compromettre notre stratégie. Il est donc essentiel de respecter le confinement jusqu’au bout. » L’incertitude et l’inquiétude restent reines, à moins d’une semaine du 11 mai.

05 mai 2020 (A. Wdo/Hans Lucas via AFP)