Shincha 2020, sencha Saemidori de Tashiro, Kagoshima

Par Florentw
Je propose chaque année un très beau Saemidori récolte manuelle de Kirishima à Kagoshima, mais il faut bien dire que ce cépage pourtant majeur est assez peu représenté dans ma sélection pour Thés du Japon. Pourquoi majeur ? Parce que ce croisement Yabukita x Asatsuyu enregistré en 1991 est le cultivar ayant connu la plus grande progression ces 2 dernières années, poussé par son très fort umami, sa couleur naturellement très verte, et son caractère hâtif (au moment du shincha, ce sont les thés qui arrivent le plus vite sur le marché qui se vendent le plus cher). Bien sûr il ne représente toujours à peine 3% de la surface cultivée mais cela le  place 3ème après Yabukita (75%) et Yutaka-midori (5%). On le trouve essentiellement représenter à Kagoshima mais aussi à Kyûshû dans son ensemble, à Kyôto où il commence à être très apprécié pour gyokuro et tencha (matcha) et dans les zones tempérées de Shizuoka. Caractère hâtif et sensibilité au froid en fond un cultivar qu'il n'est pas possible de cultiver partout.  C'est une raison important pour laquelle Saemidori n'a pas pu s'imposer comme un remplaçant de Yabukita, malgré son succès important auprès du grand public dont témoignent par exemple les résultats des Nihon-cha Award depuis leur début.
Franchement, si Saemidori a des qualités taillées pour le marché et la tendance à l'umami et au "vert", Saemidori est très loin d'abord la richesse aromatique de Yabukita et n'offrira pas une variété aussi importante non plus. C'est pour cela qu'il est finelement peu représenté sur Thés du Japon.
Mais comme on dit l'occasion fait le larron et j'ai pu mettre la main sur un Saemidori de Kagoshima, certes tout à fait fait typique, mais suffisamment différent de celui de Kirishima.
Il provient de Tashiro une localité de la commune de Kinkô sur la péninsule de Ôsumi. C'est une zone de montagne douce, moins connu que les géants Chiran et Makurazaki de l'autre côté sur la péninsule de Satsuma.

C'est un fukamushi raisonnable, qui donne des feuilles brisées, mais pas en l'état de poudre non plus. il y a bien sûr un ombrage, de 6 jours environ j'imagine.
La torréfaction (séchage final, hi-ire) est moyenne, vraiment bien maîtrisée, mettant bien en valeur les qualités intrinsèques de ces feuilles.

Je vais d'abord évoquer les aspects typiques de ce Saemidori : une grande rondeur en bouche, beaucoup d'umami en bon équilibre avec un after végétale, évoquant des légumes verts cuits (bref, très végétal, il n'est pas herbeux non plus). La sensation générale, sans astringence, et sucrée et veloutée. Sans avoir énormément de corps, la longueur en bouche est importante et le palais est tapissé durablement de ces douces sensations végétales et sucrées.
Déjà, nous avons là un sencha Saemidori typique mais de qualité.
Pourtant, ce qui a attiré mon attention sur ce sencha, ce qui a fait qu'il n'était pas un échantillon de thé de Kagoshima parmi tant d'autres, c'est la présence d'arômes, un peu au nez, plus encore en retro-olfaction, en seconde infusion de manière plus sensible encore, d'arômes disais-je m'évoquant la noix de coco et la pêche (une pêche encore un peu dure encore).
Cet aspect fruité, presque estival, est ce qui fait toute l'originalité de ce sencha Saemidori. Ce type d'arômes est évidemment quelque chose qui est amplifié par la torréfaction, mais il me semble que de tels arômes, aussi évidents et distinctifs sont bien rares alors que des Saemidori avec une torréfaction sensible est une chose tout à fait commune. "Ombrage - fukamushi - torréfaction moyenne à forte" est un motif quasiment standard aujourd'hui, pourtant avec cela ce Saemidori semble sortir du lot.

Voilà donc une belle surprise, un thé japonais typique mais non sans personnalité, qui n'a certes par la finesse du Saemidori de Kirishima, mais constitue une valeur sûre.