Colette, Catherine et Laurence ou le culte de l'excellence
Par Jacques Déhaire
Petit pèlerinage sur la tombe de Théo, au milieu des vignes. Visites. Dégustations. Soirée au munster. Et longue conversation. Philosophique ou presque. Sur l'art du boire et du manger. Sur les mets et les vins. Sur les bienfaits des traditions mariées aux techniques modernes. Sur ce culte de l'excellence qui doit à la vie richesse, intensité, bonheur...m^me quand le destin frappe dans le dos, sème de vrais malheurs.
La veuve Faller est bien vite devenue Colette Faller. Colette. La reine du vignoble. Et elle a gagné son pari. Qualité extrême. Exigence en tout et pour tout. Intelligence commerciale. Et générosité. Non seulement « les Capucines », à Kaysersberg sont restées l'un des bijoux des vignobles rhénans, mais le domaine WEINBACH a su conforter sa réputation, accroître son rayonnement. Etre synonyme de vins d'exception. Extra-ordinaires ! Que l'on trouve sur les meilleures tables dans le monde entier.
Plus et mieux. Colette a su transmettre à ses filles son amour du domaine, de l'héritage, de l'excellence et du vin. De la table et des rencontres. Colette et ses filles. Trois reines du vignoble,aujourd'hui. Toute une philosophie : La recherche constante de la perfection et du meilleur produit avec un mode culture qui concilie respect de la nature et innovation. Depuis 1998, un tiers du vignoble est conduit en biodynamique. Avec une vinification adaptées à l'alchimie du terroir et des cépages. Avec surtout les tests rigoureux, implacables de la dégustation
La Biodynamie ? L'art et la technique pour faire jouer le plus possible les éléments naturels. Il s'agit de capturer toutes les énergies propices et de faire vivre la partie souterraine de la plante (racines) comme sa partie aérienne (feuilles, fleurs et fruits). La Terre prend et la Terre donne en vertu de phénomènes cycliques incessant : ce sont eux qu'il s'agit d'appréhender pour se servir de la nature pour aider la nature.
La Biodynamie agit sur les processus organiques du végétal par aspersion de préparations à base de plantes, de cristal de roche ou de matières animales, soit sur le sol, soit sur les feuilles. Ainsi, ces préparations naturelles agissent comme des catalyseurs sur la formation de matière : bourgeons, fleurs et fruits. Ce qui se retrouve ...dans les verres. Séduction...
Vous avez dit « séduction » ? Colette et ses filles ne sont pas séductrices mais séduisantes. Naturellement. Comme par biodynamie. Le Monde consacre dans ses éditions de ce dimanche leur consacre un excellent article signé Raphaëlle Baquet
« L'hymne à la vigne »
Dans son petit transat posé sur la longue table en bois massif des Vosges, capable d'accueillir vingt-quatre convives, Armand, le dernier-né de la famille, âgé de 5 semaines, a entamé une sieste, déjà groggy par les sublimes effluves. Au téléphone, c'est leur mère, Colette, qui a tout arrangé : "Bien sûr, nous vous gardons à déjeuner..." Même le plus pur esprit n'aurait pas refusé. »
Il n'y a pas que la politique dans la vie, Raphaëlle, n'est-ce pas ?
AH ! CES FEMMES ! Raphaëlle Baquet poursuit : « Les soeurs Faller ont longtemps eu la réputation d'être les deux plus beaux partis du vignoble. Deux jolies femmes. Vingt-huit hectares dans les meilleurs terroirs d'Alsace. (...) Dans le milieu passablement masculin du vin, leur tandem fait sensation. On les appelle "les soeurs Faller". La brune et la blonde. Celle qui vend et celle qui vinifie. Admirées des hommes en général et des amateurs de belles bouteilles en particulier. Longtemps, pourtant, elles n'ont été que les filles de Colette. Sur les étiquettes, c'est elle, leur mère, qui apparaissait, en maîtresse femme ayant repris, après la mort brutale de son mari, ce formidable vignoble situé pratiquement d'un seul tenant sur la côte de Kaysersberg, dans le Haut-Rhin. »
HERITAGES : « Leur père, Théo Faller, avait lui-même attendu des années avant de supprimer le "Faller Frères", qui signait les vins de son propre père, Théodore, et de son oncle Jean-Baptiste, tanneurs à Kaysersberg et acheteurs, au début du siècle, de cet ancien monastère fondé par les capucins, rappelle Raphaëlle Baquet.
« Aujourd'hui, c'est Laurence ( à droite) qui "fait" les vins. Elle les aime plus tendus et plus purs que ceux élaborés par sa mère, dans cette région qui produit souvent des nectars sucrés. Sous l'influence des filles, le domaine des Faller a pénétré le marché américain et plus généralement les pays étrangers, au point de vendre 65 % des vins à l'exportation quand, cinquante ans auparavant, tout partait vers les seuls restaurants de la région. Leur mère laisse faire. Lorsqu'il y a un désaccord, le "Colette" qui vient remplacer "maman" dans la bouche de ses filles est le seul indice de leurs rares conflits. »
SENSUALITE ET HUMOUR : »A elles trois, la mère et les soeurs ont constitué une machine sans faille. Complémentaires, diaboliquement séduisantes et très efficaces. Pas un vigneron, pas un critique qui ne soit tombé un jour amoureux de la sensualité et de l'humour de Catherine ou de la beauté tranchante de Laurence, avant de repartir bredouille, doté seulement de leurs exceptionnelles bouteilles. »
On ne repart jamais bredouille du Domaine de Colette et de ses filles, Raphaëlle. Les plaisirs du converser, du déguster, du regarder, du respirer, se gravent sur le disque dur de nos mémoires. Comme leur vin qui a autant de corps que d'esprit...
Jacques DEHAIRE
Le site du Domaine
http://www.domaineweinbach.com/
La ville de Kaysersberg,la ville natale d'Albert Schweitzer
http://www.ville-kaysersberg.fr/index.htm