« La Peste », Albert Camus, Folio
A l’aune de ce confinement, je me suis replongé dans la lecture de ce chef – d’oeuvre d’Albert Camus, La Peste. Dans une autre approche philosophique, ce qui est intéressant dans la solitude du confinement, c’est le destin collectif résultant d’une somme de destins individuels dans ce type de crise. En témoigne le rebond des ventes du roman La Peste d’Albert Camus, premier grand succès littéraire de l’écrivain (prix Nobel 1957), couplé au soixantième anniversaire de sa mort. La ressemblance est prophétique, y étant décrit la ville d’Oran, en Algérie alors française, dans les années 1940, où s’abat une épidémie de peste dans l’insouciance du printemps. Y est témoigné dans ce roman, toute la pugnacité des médecins et du préfet pour tenter de juguler l’épidémie par les mesures appropriées. Mais surtout ce roman témoigne avec justesse des attitudes collectives face à une crise sanitaire.
Le roman souligne l’aléatoire et le subjectif de la vie, s’avérant que nous sommes tous peu de choses (parfois), face à la maladie. C’est une méditation sur le mal, l’absurdité mais aussi la solidarité humaine, au travers cette lecture pas si anxiogène qu’il n’y paraît. C’est un portrait d’une société à qui on a ôté les libertés fondamentales. On y trouve différents personnages : Bernard Rieux, médecin oranais pragmatique et luttant contre la maladie, les autorités décidant le confinement de la population oranaise, Rambert, journaliste cherchant à fuir la ville, Tarrou tenant une chronique quotidienne sur l’évolution de la maladie, Paneloux, prêtre jésuite voyant dans la peste une malédiction divine. La Peste était aussi une allégorie du nazisme, dans le contexte de l’après-guerre.
Ce qu’il en ressort est que les hommes sont plutôt bons que mauvais, du moins selon Camus. « Chacun la porte en soi, la peste, parce que personne, non, personne au monde n’en est indemne… ». Vu sous un autre point de vue, le confinement est une épreuve psychique à ne pas sous-estimer pour certains, susceptible d’engendrer : anxiété, dépression, frustration. Ce type de quarantaine ne se révèle pas être une expérience anodine, nécessitant parfois un soutien psychologique approprié. A ce titre, la médecine se fait le relais des crises d’angoisse et des insomnies ayant suivi la courbe de l’épidémie actuelle. S’y ajoute la peur pour l’entourage, le sentiment personnel de vulnérabilité face à la maladie dans une impermanence des choses, la crainte certes non réellement justifiée (mais réelle chez certains) d’une catastrophe sanitaire généralisée.