Le "Grand dictionnaire de cuisine" fut sa dernière oeuvre. "Mon dernier ouvrage sera un dictionnaire de cuisine" avait-il l’habitude de dire. Il le considérait comme "le couronnement d'une oeuvre littéraire de quatre ou cinq cents volumes". L’ouvrage commence par "quelques mots au lecteur". On lit au début "L’homme reçut de son estomac, en naissant, l'ordre de manger au moins trois fois par jour, pour réparer les forces que lui enlèvent le travail et, plus souvent encore, la paresse".
Pour ce travail, Alexandre Dumas bénéficia des conseils d’Adolphe Dugléré, célèbre cuisinier qui avait officié dans de grands établissements parisiens de l’époque comme les Trois Frères Provençaux ou le Café Anglais.
Pour la rédaction en 1869, l’écrivain s’était retiré quelques semaines à Roscoff, dans le Finistère, en compagnie de sa cuisinière Marie. Cette dernière qui connaissait les talents culinaires de l’auteur disait qu’"il avait le tort de faire des livres, et c’est ce qui l’a perdu"…
Ce gros ouvrage abondamment illustré, sera tout à la fois un livre de recettes, 3.000, de souvenirs et d’anecdotes, sous forme de glossaire qui conduit d’"abaisse" à "zuchetti", un dessert italien, Il se termine par quelques menus légendaires. Alexandre Dumas a voulu évoquer les cuisines que ses voyages lui avaient mis de connaître, il cite évidemment des plats connus, en invente d’autres pleins de fantaisie. Il n’est pas à une approximation près, il raconte par exemple que le dindon a été rapporté par Jacques Coeur ou par les Jésuites de l’Inde en 1432, on sait que le volatile est originaire du Mexique et que l'ordre des Jésuites fut créé plus tard.... On retrouve dans tout cela l’imagination débridée de l’auteur des "Trois mousquetaires".
Au fil du temps, l’ouvrage connaîtra différentes versions et plusieurs rééditions, le "Grand dictionnaire de cuisine" est devnu "Petit dictionnaire de cuisine" puis "Mon dictionnaire de cuisine"…en édition de poche. Même si certaines ne sont pas toujours faciles à réaliser, on peut en citer quelques-unes: "on fait avec la queue du kangourou, très musculeuse et très forte, une soupe qui l’emporte sur toute autre par sa saveur et sa bonté"; "prenez un ou plusieurs pieds de jeunes éléphants, enlevez la peau et les os après les avoir fait dégorger pendant quatre heures à l’eau tiède…". "Mettez tout chaud le sang de dix pigeons dans une casserole avec le jus d'un citron. De crainte qu'il ne tourne, passez le sang au travers d'un tamis, mettez-le avec douze oeufs, les blancs fouettés, sel, poivre, une cuillerée de crème, des petits morceaux de beurre. Battez bien vos oeufs ; mettez un quarteron de bon beurre dans une poêle, faites-en une omelette ; quand elle est cuite, roulez-la dans le plat que vous devez servir". "Les crapauds des Antilles ont la chair aussi bonne et aussi délicate que l'est celle de nos grenouilles, et comme ils sont fort gros, deux de ces crapauds suffisent pour faire un bon plat que l'on sert en fricassée de poulet et dont les indigènes sont friands". "La chair du buffle est moins agréable à manger que celle du boeuf, cependant elle est fort bonne et fort saine". "La chair de l'ours est mangée aujourd'hui par tous les peuples de l'Europe". "La chair de l'autruche n'est pas très bonne; elle est dure et sans aucun goût ; cependant l'aile, qui en est la partie la plus tendre, et les filets bien assaisonnés peuvent encore se manger".
En ce moment, il ne serait pas recommandé de cuisiner l’agouti, espèce de rongeur, même si Dumas nous dit que la chair des agoutis gras et bien nourris est assez bonne à manger, quoiqu'elle ait un peu le goût sauvage; on la prépare comme celle du cochon de lait, dont elle a les propriétés alimentaires".
Quant à cette description "La chair de l'albatros est bardée d'une graisse excellente dont on se sert comme aliment; mais cette chair est dure, coriace, de difficile digestion. Chez les jeunes, au contraire, elle est aussi tendre que celle de l'agneau", on imagine qu’elle doit faire se retourner Baudelaire dans sa tombe, lui qui dans un poème célèbre le dépeint comme le "prince des nuée" et duquel "ses ailes de géant l’empêchent de marcher"...
Rédaction internationale En savoir plus sur cet auteur Les mensonges ont ceci de curieux qu’ils ont la vie dure. Une fois démasqués, ceux qui les ont répandus croient qu’ils sont devenus vérités. N’est-ce pas ainsi que l’on pourrait décrire la situation dans laquelle se trouve le gouvernement français...