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LOBBYING. Covid-19 – » la bonne excuse anti-écolo des groupes français » Par Marie-Noëlle Bertrand

Publié le 26 avril 2020 par Particommuniste34200

La crise du coronavirus semble une aubaine pour les multinationales françaises, qui s’en saisissent pour faire tomber une à une les contraintes environnementales qui leur pendaient au nez.

Le bras de fer est engagé. D’un côté, ceux qui voient dans la crise du coronavirus une opportunité d’accélérer la transition vers une économie bas carbone. De l’autre, ceux qui y ont repéré l’occasion de relancer plein pot des secteurs écologiquement sur la sellette. Il faut bien le reconnaître, les seconds ont déjà marqué des points. Parmi eux : le 18 avril, la validation, par l’Assemblée nationale, d’un plan de soutien de 100 milliards d’euros aux entreprises fragilisées par la crise, dont 20 milliards seront fléchés vers celles dites stratégiques. Bercy n’en avait pas livré la liste. Vendredi 24 avril, le gouvernement a confirmé que 7 milliards d’euros seraient accordés à la compagnie aérienne Air France. Elle devrait par ailleurs recevoir une aide d’urgence de 2 à 4 milliards d’euros des Pays-Bas, eux également actionnaires. 10 milliards d’euros au total que Bruno Le Maire a lui-même qualifiés d’ « historiques ». Le ministre de l’Économie l’a juré : cette aide n’est « pas un chèque en blanc ». En contrepartie, Air France doit « devenir plus rentable », a-t-il commandé. Elle doit aussi « devenir la compagnie aérienne la plus respectueuse de l’environnement de la planète », et présenter un plan de réduction des émissions de CO2.

Le pilonnage de l’environnement par la relance a déjà démarré

Rien qui ne préfigure des meilleures intensions climatiques de l’aviation française. Quoi qu’en dise le gouvernement, le pilonnage de l’environnement par la relance économique a démarré. Comme en 2008, où la crise économique avait servi d’appui à plusieurs industriels et pays pour annoncer le report ou l’annulation de leurs engagements climatiques, la crise sanitaire semble être, pour les secteurs les plus polluants, une occasion de mettre à bas les contraintes qui leur pendaient au nez.

Dans un courrier du 3 avril révélé par le Canard enchaîné, le patron du Medef demande ainsi à Élisabeth Borne un moratoire sur la mise en place des dispositions énergétiques et environnementales liées à la loi sur la lutte contre le gaspillage. Pour ­Geoffroy Roux de Bézieux, il est « indispensable d’envisager de reporter (…) les délais d’application de la loi afin de garantir une participation pleine et entière des entreprises à la préparation des textes sur l’économie circulaire ». Gêné aux entournures, le gouvernement laisse entendre qu’il ne répondra pas à la demande. « La crise sanitaire n’efface pas l’urgence climatique », insistait Élisabeth Borne, ministre de l’Écologie, le 22 avril dans les Échos. L’exécutif ne se prive cependant pas de rendre d’une main ce qu’il fait mine de ne pas vouloir accorder de l’autre.

Le groupe a, visiblement, mieux compris la première injonction que la seconde : il vient d’annoncer la réouverture, dès le 11 mai et deux fois par semaine, de lignes intérieures entre Paris-Charles-de-Gaulle et Bordeaux, Brest et Montpellier. Des trajets réalisables en moins de quatre heures par TGV.

Un report de toute nouvelle régulation européenne

Le 8 avril, sans publicité, il publiait un décret autorisant l’ensemble des préfets à déroger à certaines normes réglementaires dans des champs d’application aussi vastes que l’emploi, l’aménagement du territoire ou encore l’environnement. Dans ce dernier domaine, détaille le site Reporterre, le préfet pourra ainsi restreindre la durée d’une enquête publique, passer outre une étude d’impact et même limiter certaines consultations préalables.

Les groupes français n’entendent pas cantonner l’effet d’aubaine aux frontières nationales. Regroupées au sein de ­l’Association française des entreprises privées, plusieurs multinationales « font du lobbying auprès de la Commission européenne pour obtenir le report ou l’annulation de ­nombreuses initiatives de transition écologique », relève Maxime Combes, économiste et membre d’Attac, dans une tribune publiée par Bastamag.

Un document, publié par le média Contexte, révèle ainsi que les dirigeants français proposent de reporter de plusieurs mois, voire années, toute nouvelle régulation européenne en matière écologique, singulièrement la directive sur les émissions industrielles pour réduire les polluants et gaz à effet de serre. Renault, L’Oréal, Danone, Saint-Gobain, Nestlé, Engie ou encore Suez figurent parmi les signataires. Il y a dix jours, les mêmes ratifiaient une tribune, aux côtés du député européen LaREM Pascal Canfin, du secrétaire général de la CFDT Laurent Berger ou encore du député européen EELV ­Yannick Jadot, appelant à mettre en œuvre des « investissements pour la relance verte et la ­biodiversité ».

LOBBYING. Covid-19 –  » la bonne excuse anti-écolo des groupes français  » Par Marie-Noëlle Bertrand
27 avril 2020

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