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Charles Bukowski – Il venait pour les moulins à vent, oui

Par Stéphane Chabrières @schabrieres

quelque chose pour t’aider à tenir le coup
serait le bienvenu
tandis que les filles de ferme crient des obscénités
dans des dialectes en tout genre,
l’usine est à l’arrêt,
il y a des massacres dans les enseignes de
fast-foods,
frère Tuck l’a dans l’os,
les Etats-Unis se classent au 17e rang des nations
en termes de longévité des
individus,
et personne ne nettoie le pare-brise.

La bête sommeille à Beverly Hills,
Van Gogh est un milliardaire absent,
l’Homme de Mars bandit l’as de
pique,
Hollywood vire au soap opéra,
le cheval monte le jockey,
la putain taille une pipe au congrès,
il ne reste plus qu’une vie au chat,
le cul-de-sac est un psychiatre,
la table est mise avec des fantasmes à tête de
poisson,
le rêve s’abat comme une matraque dans les
chiottes
pour homme,
les sans-abri se font rouler,
les dés sont jetés,
le rideau est baissé,
les sièges sont vides,
le gardien s’est suicidé,
les lumières sont éteintes,
personne n’attend Godot,
quelque chose pour t’aider à tenir le coup
serait le bienvenu,
salement
follement,
maintenant
dans la forêt qui brûle
dans la mer agonisante
dans les sonnets monotones
et les soleils levants
gâchés,
il faudrait quelque chose
ici
au-delà de cette musique
pourrie,
ces décennies cisaillées,
cet endroit comme celui-là,
cette époque,
la tienne,
mutilée,
recrachée,
le dos d’un miroir, une
mamelle de porc ;
une graine sur un rocher,
froide,
même pas la mort
d’un cafard
en attendant.

*

he went for the windmills, yes

something to keep you going is needed
badly
as the milkmaids now scream obscenities
in sundry dialects,
the mill is shut down,
there are mass murders at hamburger
joints,
friar Tuck is screwed,
the United States ranks 17th of the
nations in longevity of the
individual,
and nobody wipes the windshield.

the beast sleeps in Beverly Hills,
Van Gogh is an absentee billionaire,
the Man from Mars deals the ace of
spades,
Hollywood goes soap opera,
the horse rides the jock,
the whore blows congress,
the cat is down to one life,
the dead end street is a psychiatrist,
the table is set with fish-head fantasies,
the dream strikes like a blackjack in the men’s
crapper,
the homeless are rolled,
the dice are fixed,
the curtain is down,
the seats are empty,
the watchman has suicided,
the lights are out,
nobody waits for Godot
something to keep you going is needed
badly,
madly,
right now
in the burning forest
in the dying sea
in the dull sonnets
and the wasted
sunrises,
something is needed
here
besides this rotten
music,
these shorn decades,
this place like this,
this time,
yours,
mutilated, spit
away,
a mirror’s back, a
hog’s teat;
a seed upon a rock,
cold,
not even the death of
a cockroach
now.

***

Charles Bukowski (1920-1994)Storm for the Living and the Dead (Ecco, 2017) – Tempête pour les morts et les vivants

(Au diable vauvert, 2019) – Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Romain Monnery.


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