La déclaration des auteurs contre le travail gratuit
Raymond Viger Dossier Livres
Depuis l’automne dernier, une pétition des auteurs professionnels circulent. La pétition réclame de meilleures conditions de travail pour les auteurs.
Il faut savoir que le contrat de base d’un auteur qui aurait travaillé une année complète pour préparer la publication d’un roman ne lui garantit pas d’être payé pour ce travail. Il ne recevra que 10% des ventes en royauté. Sachant qu’un best-seller au Québec représente des ventes de 3 000 exemplaires, s’il se vend à 30$ l’auteur recevra 9 000$ pour son année de travail. Faux. Il devra faire la promotion de son livre, se déplacer souvent à ces frais dans les salons du livre, séance de signature et autre. Encore plus de travail, de déplacements et de dépenses.
Mis à part quelques rares exceptions, pour la majorité des auteurs, il faut être enseignant, journaliste, un travail qui n’exige pas 100% de notre énergie, d’avoir hérité ou d’être millionnaire…
Quand l’UNEQ réclame et affiche des taux minimums (vraiment minimum) pour le travail d’écrivain, je suis parfaitement d’accord.
Quand les auteurs se réunissent pour mettre sur la table une pétition pour réclamer de meilleurs conditions de travail (ou de survie), je suis parfaitement d’accord.
Depuis près de 30 ans, notre organisme a toujours fait un point d’honneur à ne jamais demander de bénévolat auprès des artistes que nous représentons. Quand nous faisons un spectacle de financement, nous mettons nos jeunes artistes à l’honneur et nous leur payons tous leur cachet. Et ce principe est valable aussi pour les artistes invités. Nous avons été fier de dire que, parce que nous payons des cachets à chaque artiste, tous nos spectacles de financement ont été déficitaires.
Quand je veux inviter un certain nombre d’artistes pour des événements, il m’arrive souvent de débuter par démarcher des commandites et des bailleurs de fonds. Quand je suis accepté et que j’ai l’argent en main, à ce moment-là je contacte l’artiste et je lui parle de mon projet.
Je dois cependant mettre un bémol à l’une des affirmations de l’UNEQ.
La crise n’est pas une excuse au travail gratuit des écrivaines et des écrivains !
Nous sommes en période de confinement. Le Québec est mis sur pause. Pour soutenir tous les Canadiens, le gouvernement a créé la Prestation canadienne d’urgence permettant de recevoir 2 000$.
L’UNEQ avait remarqué des annonces destinées aux artistes faisant appel à leur générosité et à leur solidarité, les invitant à produire du contenu en ligne pour aider la population à « mieux vivre » cette crise.
Compte tenu que nous sommes confiné à la maison, que nous recevons une allocation malgré que nous nous soyons dans l’impossibilité de travailler, pourquoi ne pas prendre ce temps, payé par les taxes de tout le monde, pour se faire connaître, se faire entendre et distraire les gens qui, vont payer les allocations que l’on reçoit.
C’est un des rares cas où je pourrais être d’accord avec le principe d’actions bénévoles des artistes.
Malgré tout, je lance un message aux organismes communautaires. Il ne faut pas que demander un travail bénévole des artistes soit une mauvaise habitude ou une mauvaise façon de travailler. Nous avons une responsabilité de créer une richesse sociale à tous les niveaux. Et cela commence par payer les artistes pour leur travail et leur implication.
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