La nuit un poème de Victor Hugo( 1802-1885) écrit en 1846. Les sombres nuées qui s'amoncellent sur la planète ces dernières semaines ne doivent pas nous empêcher de nous cultiver ni de profiter de la simple beauté de mots.
Comme dans tout poème, chacun y trouvera ce qu'il y amène par sa lecture.
Recueil : .Les arbres se parlent tout bas.Les sombres moires de la nuit.Tout s'enfuit, se cache et se tait.Dans cette sombre immensité.Le grand Être mystérieux !Qui vont du chaos au néant ?À l'heure trouble où nous dormons ?Dont peut-être il n'est pas content !Roulent dans cette obscurité !Tout jeter, et recommencer ?Comme un grand édifice noir !Que celles qui viennent des cieux !Pourquoi tombe-t-on à genoux ?Le lion ne se sent plus roi ?Où l'âme plonge, où l'œil se perd,Ô ténèbres de l'infini ? Toute la lyre (1888 et 1893)
Le ciel d'étain au ciel de cuivre
Succède. La nuit fait un pas.
Les choses de l'ombre vont vivre.
Le vent, soufflant des empyrées, Fait frissonner dans l'onde où luit
Le drap d'or des claires soirées,
Tout à l'heure, tout écoutait ;
Puis la nuit fait un pas encore.
Maintenant nul bruit n'ose éclore ;
Regarde avec anxiété
Tout ce qui vit, existe ou pense, S'avancer ce sombre silence
Sent distinctement dans les cieux,
Dans la grande étendue obscure
C'est l'heure où toute créature
Ce Dieu qui détruit en créant,
Que pense-t-il de tous ces mondes
Dans ses réflexions profondes,
Est-ce aux anges ? Est-ce aux démons ?
À quoi songe-t-il, lui qui veille
Est-ce à nous qu'il prête l'oreille ?
Que d'astres à l'orbe éclatant,
Que de mondes dans ces abîmes
Que de soleils, spectres sublimes, Dans l'océan illimité,
Que de créations difformes
Mérite-t-il de le fixer ?
Ainsi que des monstres énormes
Ne va-t-il pas briser ce moule,
Cette heure sombre nous fait voir
L'univers, où sa sève coule, La création tout entière
Quand l'azur s'éclipse à nos yeux,
Ce sont d'effrayantes pensées
Nul asile que la prière !
Fait vibrer quelque chose en nous !
Pourquoi cherche-t-on dans le vide ?
Quand flottent les ombres glacées,
D'où vient que, sous ce morne effroi,
Le moineau ne se sent plus libre,
Oh ! la nuit muette et livide
Au fond du ciel de deuil couvert,
Dans ces profondeurs inouïes
Quelle est cette secrète fibre ? Qui fait que l'homme, esprit banni,
À peur de votre calme horrible,
Questions dans l'ombre enfouies !
Que se passe-t-il de terrible
Le 20 mars 1846.