Silencieuse nuit. Ici dans le bois
je ne distingue pas la moindre rumeur, non, d’aucune sorte.
Les vers travaillent.
Les oiseaux de proie font leur besogne
(certainement).
Mais je n’entends rien.
Rien que le silence qui fait peur. Il est devenu
si rare, si rare en ce monde
que personne ne se rappelle à quoi il ressemble,
plus personne ne veut
se retrouver avec soi-même un seul instant.
Demain
nous remettrons de nouveau la vraie vie
à demain.
Non par dégoût d’être ni par ennui de se sentir vivant :
étonnement de se trouver ici et maintenant à cette heure aussi muette.
Silence dans ce bois, dans cette maison
au milieu du bois.
Serait-ce la fin du monde ?
*
El silencio
La silenciosa noche. Aquí en el bosque
no distingo rumores, no, de ninguna especie.
Los gusanos trabajan.
Los pájaros de presa hacen lo suyo
(seguramente).
Pero no escucho nada.
Sólo el silencio que da miedo. Tan raro,
tan raro, tan escaso se ha vuelto en este mundo
que ya nadie se acuerda como suena,
ya nadie quiere
estar consigo mismo un instante.
Mañana
dejaremos de nuevo la verdadera vida para
mañana.
No asco de ser ni pesadumbre de estar vivo:
extrañeza de hallarse aquí y ahora en esta hora tan muda.
Silencio en este bosque, en esta casa
a la mitad del bosque.
¿Se habrá acabado el mundo?
***
José Emilio Pacheco (1939-2014) – Gota de lluvia y otros poemas para niños y jóvenes (2005) – Traduit de l’espagnol (Mexique) par Philippe Chéron.