En même temps » qu’ils multiplient les éloges sur les personnels de santé des hôpitaux publics, nos gouvernants commandent en douce des rapports qui visent à poursuivre l’asphyxie de notre système de santé public !
Cette haute trahison, cette forfaiture, intervient alors que médecins, infirmiers ou réanimateurs se saignent aux quatre veines pour soigner et sauver des vies en mettant la leur en danger, du fait même des pénuries et négligences gouvernementales. Ce sale coup se prépare dans les arrière-cuisines peu ragoutantes des industries chimiques, des assurances privées, des banques et des cabinets ministériels. Les voici qui affûtent en bande organisée des projets pour tirer parti du drame planétaire et relancer le business capitaliste. Par devant, le président de la République proclame d’une voix apeurée que la santé appartient « aux biens et service qui doivent être placés en dehors des lois du marché». Par derrière, il commande à la Caisse des dépôts et consignations, bras financier de l’Etat dont l’indépendance a encore été réduite avec la récente loi « Pacte », un rapport dont l’objectif est d’accélérer le processus de marchandisation de la santé. Ce même processus qui nous conduit aux actuelles hécatombes.
Dans une copie destinée au cabinet élyséen, le service de prospection stratégique de la Caisse des dépôts prône le désarmement total de l’Etat social et de la protection des citoyens, la mise en concurrence plus grande des secteurs publics et privés pour abaisser encore les rémunérations des personnels de santé. Il propose d’accélérer les privatisations de l’hôpital public avec les fameux partenariats « public-privé » qui ont tous conduit à des fiascos sanitaires et économiques. Seules les banques s’en frottent les mains.
Et rien n’est prévu pour augmenter les dépenses publiques de santé puisque nos ronds-de-cuir insistent pour maintenir le corset avec le fameux « objectif national des dépenses d’assurances maladie », tandis que seule la dette des cliniques privées serait restructurée au-delà des engagements gouvernementaux. La stratégie des commanditaires de ce rapport est de pousser les feux d’un capitalisme sanitaire, appuyé sur un capitalisme numérique et financier. Des catégories de personnels seraient remplacées par une cohorte de start-up alliées aux grandes compagnies d’assurances comme AG2R ou Malakoff Humanis, des firmes chimiques comme Astra-Zeneca, des filiales du crédit agricole et de la banque postale. Et, grande innovation des technophiles du capital, puisque les banques et la Caisse des dépôts ont garanti ces dernières années des milliards d’euros aux grands croisiéristes dont l’activité a spectaculairement chutée, on transformera ces grands bateaux en « navire-hôpital en contrepartie d’une rémunération ». Inouï !
Ainsi au cœur de la pandémie, au centre d’un malheur planétaire, les milieux d’affaires en lien avec des secteurs décideurs de l’Etat réfléchissent aux moyens non pas de protéger les êtres humains, mais à la meilleure façon de profiter de la situation. Ceci, en mettant l’épargne populaire à disposition de la relance d’un capitalisme dont de plus en plus de personnes mesurent les impasses mortifères. La riposte s’impose. Les débats et les prises de positions ne doivent pas rester confinés, il faut une entière transparence sur les dettes des hôpitaux et réclamer leur annulation totale, obtenir une augmentation substantielle des rémunérations des travailleurs de la santé, le retour sur tous les conquis détruits des agents du service public, un plan audacieux d’embauches, la réouverture des hôpitaux fermés, la relance de la recherche fondamentale.
On trouve bien des centaines de milliards pour le secteur privé. On doit bien en trouver pour l’hôpital public. Au-delà, une grande politique de la santé publique dans le cadre d’une sécurité sociale de la vie doit être inventée, non pas avec les technophile de la Caisse des dépôts mais avec le concours de tous les intéressés, salariés et usagers.
06 avril 2020